dimanche, 02 mars 2014
La mémoire de nos corps
Question de foi "A la résurrection, porterons-nous la mémoire de nos corps ?", in La revue Passy Notre-Dame, numéro 522, décembre 2013, Père Luc de Bellescize :
Dans le film du cinéaste danois Dreyer, Ordet, qui signifie "la parole", tournée en 1955, un jeune époux perd son épouse en couches et toute la maison entre dans le grand silence du deuil. Un des enfants arrête la pendule du salon. Le vieux père de famille répète comme un douloureux refrain la parole de Job : "Le Seigneur a donné, le Seigneur a ôté, que le Nom du Seigneur soi béni" (Job 1,21), puis il dit à son fils que l'âme de son épouse est vivante avec Dieu. Mais le fils répond ces mots si justes : "Mais son corps ? Jamais son corps." Comme elle est vraie cette parole.
Ce que nous aimons chez les êtres, c'est leur présence charnelle, leur manière d'apparaître, c'est le souffle fragile de leur vie, le vase d'argile de leur corps, de leur odeur, de leurs gestes, de leurs vêtements qui font le charme indéfinissable d'une personne où les "parfums, les couleurs et les sons se répondent", comme l'écrit Baudelaire.
"A la résurrection, on ne prend plus ni femme ni mari" (Mt 22,30), dit le Seigneur, mais cela ne signifie pas que l'on n'a jamais été marié. Il est juste de dire que dans la résurrection nous retrouverons ceux que nous avons aimés, ceux qui nous ont donné la vie, car notre foi repose non pas sur l'imagination inquiète des hommes, mais sur le corps véritable du Christ ressuscité qui dit à Thomas : "Avance ton doigt, et vois la marque des clous, avance ta main et mets-la dans mon côté, et ne sois plus incrédule, sois croyant" (Jn 20,31).
Le corps du Christ résiste aux mains de l'apôtre et son doute se dissout dans la solidité du réel.
Nous sommes les héritiers de sa résurrection. Le Christ n'est plus soumis à la puissance de la mort, et en ce sens il est autre, mais en même temps il est bien le même, et il porte en son corps la mémoire de sa vie, la marque de son amour, les signes de sa victoire.
Nos corps ressuscités porteront pour toujours la mémoire de la charité, car tout passe et tout casse, mais la charité ne passera jamais.
Les blanchisseuses, Edgar Degas
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samedi, 01 mars 2014
Etymologie - Avoir une marotte
Source : Direct Matin, vendredi 18 janvier 2013
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> Pour davantage : http://fichtre.hautetfort.com/les-mots-francais.html
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vendredi, 28 février 2014
La ruée vers quoi bordel
Extrait du film La ruée vers l'or, 1925
Réalisé par Charles Chaplin
Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai compris qu’en toutes circonstances, j’étais à la bonne place, au bon moment. Et alors, j’ai pu me relaxer. Aujourd’hui je sais que cela s’appelle… l’Estime de soi. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai pu percevoir que mon anxiété et ma souffrance émotionnelle n’étaient rie...n d’autre qu’un signal lorsque je vais à l’encontre de mes convictions. Aujourd’...hui je sais que cela s’appelle… l’Authenticité.
Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J’ai cessé de vouloir une vie différente et j’ai commencé à voir que tout ce qui m’arrive contribue à ma croissance personnelle. Aujourd’hui, je sais que cela s’appelle… la Maturité. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai commencé à percevoir l’abus dans le fait de forcer une situation ou une personne, dans le seul but d’obtenir ce que je veux, sachant très bien que ni la personne ni moi-même ne sommes prêts et que ce n’est pas le moment… Aujourd’hui, je sais que cela s’appelle… le Respect.
Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai commencé à me libérer de tout ce qui n’était pas salutaire, personnes, situations, tout ce qui baissait mon énergie. Au début, ma raison appelait cela de l’égoïsme. Aujourd’hui, je sais que cela s’appelle… l’Amour propre. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé d’avoir peur du temps libre et j’ai arrêté de faire de grands plans, j’ai abandonné les méga-projets du futur. Aujourd’hui, je fais ce qui est correct, ce que j’aime quand cela me plait et à mon rythme. Aujourd’hui, je sais que cela s’appelle… la Simplicité.
Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé de chercher à avoir toujours raison, et je me suis rendu compte de toutes les fois où je me suis trompé. Aujourd’hui, j’ai découvert … l’Humilité. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé de revivre le passé et de me préoccuper de l’avenir. Aujourd’hui, je vis au présent, là où toute la vie se passe. Aujourd’hui, je vis une seule journée à la fois. Et cela s’appelle… la Plénitude.
Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai compris que ma tête pouvait me tromper et me décevoir. Mais si je la mets au service de mon coeur, elle devient une alliée très précieuse ! Tout ceci, c’est… le Savoir vivre. Nous ne devons pas avoir peur de nous confronter. Du chaos naissent les étoiles.
Charlie Chaplin
Sur ces deux photos : Charles Chaplin et Olive Anne Alcorn
http://fichtre.hautetfort.com/archive/2013/12/02/olive-an...
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jeudi, 27 février 2014
Frédéric Dard #4
Extrait de "La face cachée de Frédéric Dard", Le Figaro littéraire, jeudi 13 février 2014 :
1921, naissance le 29 juin à Jallieu de Frédéric Charles Antoine Dard.
1938, à Lyon, où sa famille a émigré, il entre comme"démarcheur publicitaire" au Mois de Lyon, que dirige l'humoriste Marcel E. Grancher.
1946, publie La Crève aux Editions Confluences, dirigées par René Tavernier.
1949, Règle-lui son compte, le premier San-Antonio, est publié à Lyon et ne rencontre aucun succès.
1965, surmené, l'écrivain fait une tentative de suicide. Il s'installe bientôt en Suisse avec sa seconde épouse.
1972, les enquêtes du commissaire San-Antonio dépassent le cap des 115 millions d'exemplaires vendus.
2000, le 6 juin, il s'éteint dans sa ferme près de Fribourg, en Suisse.
Source : http://www.flickr.com/photos/mhlenoir/6706090731/
A lire également :
http://correspondances.saint-chef.dauphine.pagesperso-ora...
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mercredi, 26 février 2014
San Antonio, c’est graveleux docteur ? #3
Source : http://www.starzik.com/magazine/847-san-antonio-frederic-...
Les Hercule Poirot, Arsène Lupin, Sherlock Holmes n’arrivent pas à la braguette de San Antonio. Impossible de jouer les critiques Dard, sa gouaille Rabelaisienne a trop nourri notre bagage linguistique pour lui botter le derche.
San Antonio fait office d’oiseau rare dans la famille des détectives. A sa création, en 1949, il a apporté un vent de fraicheur au monde noir et parfois glauque du polar. San Antonio c’est du bagout de bon goût, des cabrioles pour fidèles voyeurs.
L’érection qu’a suscitée en nous San Antonio n’aurait pas pu naître sans un subterfuge littéraire. Frédéric Dard, papa intellectuel de San Antonio, a fait du personnage l’auteur de ses romans. En d’autres termes, Dard a signé ses romans San Antonio. Celui-ci n’est donc pas seulement le héros de ses aventures et le narrateur de ses histoires, c’est aussi l’écrivain de ses livres.
Ce n’est pas tant la double casquette du bonhomme qui nous séduit, mais son langage fleuri. Prince du calembour, roi de l’humour graveleux, le commissaire San Antonio manie la langue de Molière avec un talent fou. Aucune expression, aucune tournure ne sont laissées au hasard. Les livres de San Antonio regorgent de grivoiseries, de petits mots tels que « roustons » qu’on avait oubliés ou qu’on n’osait prononcer. Les périphrases polissonnes sont aussi de la partie. Ainsi pour parler d’orgasme San Antonio dit qu’il « poinçonne son ticket d’arc-en-ciel ».
On a oublié de vous dire, San Antonio est un obsédé de l’amour. Le commissaire vicelard s’est même lancé dans la refonte d’un Kamasutra très personnel plus complet que l’original. On est ravi de découvrir la signification du tire-bouchon moldave, du hanneton téméraire ou de la pompe à vélo investigatrice.
Celui qui a dit « L’amour, d’abord, ça ne se dit pas, ça se fait » ne cesse de raconter ses frasques sexuelles sans pudeur aucune et avec humour surtout.
Alors si le scénario est un peu facile parfois, s’il est naïf par rapport aux Sherlock Holmes et aux Miss Marpple, on s’en tamponne le coquillard. La gauloiserie de San Antonio, son humour ordurier, sa verve absolument inimitable excitent le scabreux qui sommeille en nous et c’est ça le principal.
Retrouvez toutes les aventures de San Antonio sur Starzik.com
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mardi, 25 février 2014
Frédéric Dard alias San-Antonio #2
Frédéric Dard, chez lui à Genève, en 1973
Extrait de "La face cachée de Frédéric Dard", François Rivière, Le Figaro littéraire, jeudi 13 février 2014 :
Au village d'Aillat, perché dans les collines du Dauphiné, tout le monde appelle la grand-mère du petit Frédéric Dard "Mme Larousse". Cette femme excentrique, veuve d'un receveur des postes de Bourgoin-Jallieu, ville natale du garçon, aime faire étalage d'une culture livresque totalement hétéroclite qui séduira très tôt l'enfant qu'on lui a confié. "Le goût de la lecture, c'est à ma grand-mère que je le dois, racontait Frédéric Dard en 1975 dans Je le jure. Elle me lisait au lit le soir jusqu'à ce que je sombre dans le sommeil." Ayant littéralement gavé Frédéric de contes pour enfants mai aussi des exploits des Pieds Nickelés, de Bicot et Bibi Fricotin, l'aïeule passe sans transition à ceux d'Al Capone racontés en feuilleton dans Le Petit Dauphinois. Car Mme Larousse est friande de faits divers et dévore avec le même appétit les recueils de "Crimes célèbres" de Léon Treich, Fantômas et les fascicules pliciers aux couvertures bariolées de chez Ferenczy.
Elle n'en restera pas là. Frédéric se voit offrir, lors de rituelles visites à une librairie de la place Bellecour à Lyon, les romans classiques de la collection Nelson. "A dix ans, dira-t-il encore, j'avais déjà lu Tolstoï, à treize, je m'étais farci tout Victor Hugo. A quatorze ans, j'attaquais Zola." Celui qui fanfaronna ainsi est l'auteur déjà auréolé du succès phénoménal de son double, San-Antonio, et qui se remémore avec une émotion teintée d'ironie sa soumission aux classiques. Mais lorsque, à seize ans, le cancre patenté d'une école de comptabilité lyonnaise se lance dans l'écriture d'une longue nouvelle baptisée La Peuchère, ce texte assez plat ne révèle aucune influence majeure. Frédéric vient pourtant, sur le conseil d'un parfait excentrique nommé Léon Charlais, de découvrir Voyage au bout de la nuit. Il en fera beaucoup de cas plus tard, affirmant par ailleurs : "Mort à crédit et pour moi le bouquin le plus important de ce siècle. A côté du cri de Céline, moi je pousse des plaintes de chiot qui a envie de pisser."
Toutefois, la véritable influence littéraire reflétée par les premiers écrits de Frédéric Dard, et singulièrement le roman Monsieur Joos, publié à Lyon en 1940, est celle de Simenon. Il a dévoré Faubourg et La Marie du port. En 1939, à la faveur d'une interview accordée par le célèbre père de Maigret au jeune pigiste du Mois à Lyon, le magazine où il a été engagé par l'humoriste Marcel Grancher, Frédéric fait part à Simenon de son désir d'écrire. Simenon et Dard resteront en contact pendant toute la duée de l'exil américain du premier, qui accepte de préfacer Au massacre mondain, le roman que Frédéric fait paraître, encore à Lyon, en 1948.
Il a toutefois compris que son destin passerait par la capitale, où certains de ses amis, comme Jacques Robert, l'auteur de Marie-Octobre, ont déjà émigré. Il a beau rêver du Goncourt, il sait aussi qu'en dépit de l'intérêt suscité par son court romain La Crève, traitant de l'Epuration, accepté par les très exigeantes Editions Confluences en 1946, il va devoir diversifer son talent. Frédéric écrit vite et la lecture des romans de Peter Cheyney, qui ne l'éblouissent pas autant que Le facteur sonne toujours deux fois, de James Cain, l'incite à faire dans le genre noir. C'est ainsi qu'il crée San-Antonio, se démarquant rapidement du modèle anglosaxon pour se lancer plus ou moins consciemment dans une entreprise langagière sans équivalent dans le roman d'évasion.
Mais il n'a pas jeté aux orties ses ambitions littéraires. La fascination qu'il éprouve pour le monde interlope de Francis Carco, rencontré à Paris et qui l'a autorisé à adapter pour la scène Jésus-laè-Caille, aurait pu amener Frédéric à renouveler le succès rencontré sur la scène du Théâte de l'OEuvre par la pièce qu'il a tirée de La neige était sale, de Simenon. Mais la critique ne l'entend pas de cette oreille et un Frédéric Dard mortifié se réfugie alors, dès 1951, dans la production intensive de littérature policière. Suivant le bon conseil de Cocteau, qui lui voue une grande admiration et l'incite à continuer à "écrire de la main gauche", Dard cédera enfin à la veine rabelaisienne, qui, loin de tout académisme, le changera pour toujours.
A lire également :
http://www.lefigaro.fr/sortir-paris/2010/06/28/03013-2010...
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lundi, 24 février 2014
San-Antonio alias Frédéric Dard #1
Frédéric Dard, chez lui à Genève, en 1973
Extrait de "La face cachée de Frédéric Dard", Sébastien Lapaque (slapaque@lefigaro.fr), Le Figaro littéraire, jeudi 13 février 2014 :
Souvent, c'est l'arbre qui cache la forêt. Mais avec Frédéric Dard (1921-2000), c'est toujours la forêt des livres écrits avec une régularité de métronome - "Trois pages par jour, confiait-il, mais trois pages tous les jours" - qui cache un bosquet. 180 volumes des aventures de San-Antonio, la créature qui a fini par dévorer son créateur en devenant plus célèbre que lui, nous font généralement oublier la cinquantaine de volumes dans lesquels Frédéric Dard a donné le meilleur de lui-même. Parmi ceux-ci, les 28 ites que l'écrivain nommait lui-même les "romans de la nuit" - un peu comme Georges Simenon avait parlé de "romans de la destinée" à propos de la crème de sa production : Le Testament Donadieu, Les Patard, le Bourgmestre de Furnes, etc.
[...]
Frédéric Dad, comme Georges Simenon, est un écrivain qu'on aurait tort de négliger sous prétexte qu'il fut un Hercule de la littérature de gare. D'abord parce que la littérature de gare n'est pas sans noblesse - de aurice Dekobra à Gérard de Villiers. Ensuite parce qu'à l'instar du maître liégeois, son disciple lyonnais fut un romancier capable de donner d'éblouissantes leçons sur leur propre terrain aux meilleurs écrivains de sa date. Du point de vue de la nervosité de l'intrigue, C'est toi le venin n'arainsi rien à envier à Thérèse Desqueyroux de François Mauriac ; pour ce qui est du coup de théâtre final, celui du Monte-Charge vaut bien celui de Un crime de Georges Bernanos ; quant au narrateur de Cette morte dont tu parlais, il n'est pas interdit d'en faire un cousin de L'Etranger de Camus. Vous souriez ? Lisez les sept "romans de la nuit" aujourd'hui rassemblés en volume. [...]
Non seulement parce qu'il écrivait ses livres en pensant au cinéma, mais aussi parce qu'il avait retenu les leçons du nouveau réalisme américain dont la "Série Noire" avat lancé la mode à partir de 1945. Das ses "romans de la nuit" publiés entre 1951 et 1966, Frédéric Dard a su acclimater en France une esthétique béhavioriste consistant à mettre en scène des personnages dont on ignore presque tout des pensées intimes - comme l'avait fait auparavant Boris Vian sous le pseudonyme de Vernon Sullivan avec ses romans de durs à cuire : J'irai cracher sur vos tombes, Et on tuera tous les affreux.
La haute valeur de la part méconnue de l'oeuvre de Frédéric Dard n'est pas à proprement parler une révélation. Les lecteurs disposant d'un bon radar l'avaient repérée depuis longtemps. Dans Le Nouveau Dictionnaire des auteurs de Laffont-Bompiani, publié en 1994, Alain Quesnel célébrait ainsi la valeur de ses romans sans gaudriole ni jeux de mots. "Ici, l'intrigue policière se plie à une analyse psychologique des plus fines qui révèle une vision pessimiste de la condition humaine. Dard peut légitimement être situé du côté de chez Céline, Marcel Aymé, voire Roger Nimier, à cause de son rejet désespéré de la "connerie univerelle"." [...]
A lire également :
http://www.lefigaro.fr/sortir-paris/2010/06/28/03013-2010...
07:00 Publié dans Ecrits, littérature contemporaine, Portraits de personnalités | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : san antonio, frédéric dard