vendredi, 06 décembre 2013
Lu en 2013 - Hedges
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Lu en 2013 - Malcolm X
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Lu en 2013 - Depardieu
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dimanche, 01 décembre 2013
Prière de Charles Péguy #2
Notre Dame de Grâce de Passy
Crédits photographiques Jana Hobeika
A celle qui est infiniment jeune, Parce qu'aussi elle est infiniment mère.
A celle qui est infiniment droite, Parce qu'aussi elle est infiniment penchée.
A celle qui est la plus imposante. Parce qu'aussi elle est la plus maternelle.
A celle qui est infiniment éternelle. Parce qu'aussi elle est infiniment temporelle.
A celle qui est infiniment au-dessus de nous. Parce qu'elle est infiniment parmi nous.
A celle qui est la mère et la reine des anges. Parce qu'elle est aussi la mère et la reine des hommes.
A celle qui est infiniment joyeuse, Parce qu'aussi elle est infiniment douloureuse.
Septante et sept fois septante douloureuse.
A celle qui est infiniment touchante, Parce qu'aussi elle est infiniment touchée.
A celle qui est toute Grandeur et toute Foi, Parce qu'aussi elle est toute Charité.
A celle qui est toute Foi et toute Charité, Parce qu'aussi elle est toute Espérance.
A celle qui est Marie. Parce qu'elle est pleine de grâce.
A celle qui est pleine de grâce. Parce qu'elle est avec nous.
A celle qui est avec nous. Parce que le Seigneur est avec elle.
Charles Péguy (1873-1914)
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dimanche, 24 novembre 2013
Prière de Charles Péguy #1
Notre Dame de Grâce de Passy
Crédits photographiques Jana Hobeika
Il y a des jours où les patrons et les saints ne suffisent pas. Alors il faut prendre son courage à deux mains. Et s'adresser directement à celle qui est au-dessus de tout. Être hardi. Une fois.
S'adresser hardiment à celle qui est infiniment belle, Parce qu'aussi elle est infiniment bonne.
A celle qui intercède. La seule qui puisse parler de l'autorité d'une mère.
S'adresser hardiment à celle qui est infiniment pure, Parce qu'aussi elle est infiniment douce ...
A celle qui est infiniment noble. Parce qu'aussi elle est infiniment courtoise. Infiniment accueillante.
Accueillante comme le prêtre qui au seuil de l'église va au-devant du nouveau-né jusqu'au seuil.
Au jour de son baptême. Pour l'introduire dans la maison de Dieu.
A celle qui est infiniment riche, Parce qu'aussi elle est infiniment pauvre.
A celle qui est infiniment haute, Parce qu'aussi elle est infiniment descendante.
A celle qui est infiniment grande, Parce qu'aussi elle est infiniment petite.
Infiniment humble. Une jeune mère.
Charles Péguy (1873-1914)
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lundi, 11 novembre 2013
Après l'orgie, la simulation par fractale - Jean Baudrillard (il y a plus de vingt ans)
Crédits photographiques Sylvia El Aarabi
Extrait de La Transparence du Mal, 1990, Jean Baudrillard, Galilée (pp 11 à 16) :
S'il fallait caractériser l'état actuel des choses, je dirais que c'est celui d'après l'orgie. L'orgie, c'est tout le moment explosif de la modernité, celui de la libération dans tous les domaines. Libération politique, libération sexuelle, libération des forces productives, libération des forces destructives, libération de la femme, de l'enfant, des pulsions inconscientes, libération de l'art. Assomption de tous les modèles de représentation, de tous les modèles d'anti-représentation. Ce fut une orgie totale, de réel, de rationnel, de sexuel, de critique et d'anti-critique, de croissance et de crise de croissance. Nous avons parcouru tous les chemins de la production et de la surproduction virtuelle d'objets, de signes, de messages, d'idéologies, de plaisirs. Aujourd'hui, tout est libéré, les jeux sont faits, et nous nous retrouvons collectivement devant la question cruciale : QUE FAIRE APRES L'ORGIE ?
Nous ne pouvons plus que simuler l'orgie et la libération, faire semblant d'aller dans le même sens en accélérant, mais en réalité nous accélérons dans le vide, parce que toutes les finalités de la libération sont déjà derrière nous et que ce par quoi nous sommes hantés, obsédés, c'est par cette anticipation de tous les résultats, par la disponibilité de tous les signes, de toutes les formes, de tous les désirs. Que faire alors ? C'est ça l'état de simulation, celui où nous ne pouvons que rejouer tous les scénarios parce qu'ils ont déjà eu lieu - réellement ou virtuellement. C'est celui de l'utopie réalisée, de toutes les utopies réalisées, où il faut paradoxalement continuer de vivre comme si elles ne l'étaient pas. Mais puisqu'elles le sont, et puisque nous ne pouvons plus garder l'espoir de les réaliser, il ne nous reste qu'à les hyper-réaliser dans une simulation indéfinie. Nous vivons dans la reproduction indéfinie d'idéaux, de fantasmes, d'images, de rêves qui sont désormais derrière nous, et qu'il nous faut cependant reproduire dans une sorte d'indifférence fatale.
Au fond partout la révolution a bien eu lieu, mais pas du tout comme on l'attendait. Partout ce qui a été libéré l'a été pour passer à la circulation pure, pour passer sur orbite. Avec quelque recul, on peut dire que l'aboutissement inéluctable de toute libération est de fomenter et d'alimenter les réseaux. Les choses libérées sont vouées à la commutation incessante, et donc à l'indétermination grandissante et au principe d'incertitude.
Rien (ni même Dieu) ne disparaît plus par la fin ou la mort, mais la prolifération, contamination, saturation et transparence, exténuation et extermination, par épidémie de simulation, transfert dans l'existence seconde de la simulation. Plus de mode fatal de disparition, mais un mode fractal de dispersion.
Signe astrologique du sagittaire, Yves Bady
Rien ne se réfléchit plus vraiment, ni en miroir, ni en abyme (qui n'est encore que le dédoublement à l'infini de la conscience). La logique de la dispersion virale des réseaux n'est plus celle de la valeur, ni donc de l'équivalence. Il n'y a plus de révolution, mais une circonvolution, une involution de la valeur. A la fois une compulsion centripète, et une excentricité de tous les systèmes, une métastase interne, une autovirulence fiévreuse qui les porte à exploser au-delà de leurs propres limites, à outrepasser leur propre logique, non dans la tautologie pure, mais dans une montée en puissance, dans une potentialisation fantastique où ils jouent leur propre perte.
[...] Après le stade naturel, le stade marchand, le stade structural, voici venu le stade fractal de la valeur. Au premier correspondait un référent naturel, et la valeur se développait en référence à un usage naturel du monde. Au second correspondait un équivalent général, et la valeur se développait en référence à une logique de la marchandise. Au troisième correspond un code, et la valeur s'y déploie en référence à un ensemble de modèles. Au quatrième stade, le stade fractal, ou encore le stade viral, ou encore le stade irradié de la valeur, il n'y a plus de référence du tout, la valeur irradie dans toutes les directions, dans tous les interstices, sans référence à quoi que ce soit, par pure contiguïté. A ce stade fractal, il n'y a plus d'équivalence, ni naturelle ni générale, il n'y a plus à proprement parler de loi de la valeur, il n'y a plus qu'une sorte d'épidémie de la valeur, de métastase générale de la valeur, de prolifération et de dispersion aléatoire. En toute rigueur, il ne faudrait plus parler de valeur, puisque cette sorte de démultiplication et de réaction de chaîne rend impossible toute évaluation. [...] Le bien n'est plus à la verticale du mal, rien ne se range plus en abscisses et en ordonnées. Chaque particule suit son propre mouvement, chaque valeur, ou fragment de valeur, brille un instant dans le ciel de la simulation, puis disparaît dans le vide, selon une ligne brisée qui ne rencontre qu'exceptionnellement celle des autres. C'est le schéma même du fractal, et c'est le schéma actuel de notre culture.
Quand les choses, les signes, les actions sont libérées de leur idée, de leur concept, de leur essence, de leur valeur, de leur référence, de leur origine et de leur fin, alors elles entrent dans une auto-reproduction à l'infini. Les choses continuent de fonctionner alors que l'idée en a depuis longtemps disparu. Elles continuent de fonctionner dans une indifférence totale à leur propre contenu. Et le paradoxe est qu'elles fonctionnent d'autant mieux.
Ainsi, l'idée de progrès a disparu, mais le progrès continue. L'idée de la richesse qui sous-tend la production a disparu, mais la production continue de plus belle. Elle accélère au contraire à mesure qu'elle devient indifférente à ses finalités d'origine. Du politique, on peut dire que l'idée en a disparu, mais que le jeu politique continue dans une indifférence secrète à son propre enjeu. [...] Toute chose qui perd son idée est comme l'homme qui a perdu son ombre - elle tombe dans un délire où elle se perd.
Signe astrologique de la vierge, Yves Bady
[...] Alors s'estompe en quelque sorte dans tous les domaines de la grande aventure de la sexualité, des êtres sexués - au profit du stade antérieur (?) des êtres immortels et asexués, de reproduisant comme des protozoaires, par simple division du Même et déclinaison du code. Les être technologiques actuels, les machines, les clones, les prothèses, tendent tous vers ce type de reproduction et tout doucement ils induisent le même processus chez les êtres dits humains et sexués. [...]
La possibilité de la métaphore s'évanouit dans tous les domaines. [...] Et notre mélancolie vient peut-être de là, car la métaphore était belle encore, esthétique, elle jouait de la différence et de l'illusion de la différence. [...]
Se procurer l'ouvrage :
La Transparence du Mal
Jean Baudrillard
1990
Galilée
179 pages
http://www.amazon.fr/transparence-du-mal-Jean-Baudrillard...
07:00 Publié dans Beaux-Arts, Ecrits, littérature contemporaine, Peinture, Photographie, Politique & co, Réflexions, philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : la transparence du mal, jean baudrillard
samedi, 05 octobre 2013
La Voie royale - André Malraux
André Malraux (1901-1976)
> A lire également : http://www.parismatch.com/People/Politique/J-ai-epouse-mon-beau-frere-Andre-Malraux-Par-Madeleine-Malraux-149903
Extrait de La Voie royale, André Malraux, 1960, Grasset :
[...]
"Les hommes jeunes comprennent mal... comment dites-vous ?... l'érotisme. Jusqu'à la quarantaine, on se trompe, on ne sait pas se délivrer de l'amour : un homme qui pense, non à une femme comme au complément d'un sexe, mais au sexe comme au complément d'une femme, est mûr pour l'amour : tant pis pour lui. Mais il y a pis ; l'époque où la hantise du sexe, la hantise de l'adolescence, revient, plus forte. Nourrie de toutes sortes de souvenirs..."
Claude, sentant l'odeur de poussière, de chanvre et de mouton attachée à ses habits, revit la portière de sacs légèrement relevée derrière laquelle un bras lui avait montré, tout à l'heure, une adolescente noire (épilée), une éblouissante tache de soleil sur le sein droit pointé ; et le pli de ses paupières épaisses qui exprimait si bien l'érotisme, le besoin maniaque, "le besoin d'aller jusqu'au bout de ses nerf" disait Perken... Celui-ci continuait :
"... Ils se transforment, les souvenirs... L'imagination, quelle chose extraordinaire ! En soi-même, étrangère à soi-même... L'imagination... Elle compense toujours..."
Son visage accentué sortait à peine de la pénombre, mais la lumière luisait entre ses lèvres, sur le bout de sa cigarette, doré sans doute. Claude sentait que ce qu'il pensait s'approchait peu à peu de ses paroles, comme cette barque qui venait à lentes foulées, le reflet des feux du bateau sur les bras parallèles des rameurs :
- Que voulez-vous dire exactement ?
- Vous comprendrez de vous-même, un jour ou l'autre... les bordels somalis sont pleins de surprises...
Claude connaissait cette ironie haineuse qu'un homme n'emploie guère qu'à l'égard de soi-même ou de son destin.
[...] "Il y a quelque chose, mais ce n'est pas le sadisme..."
Perken reposa sa tête sur le dossier de sa chaise longue : son masque de brute consulaire apparut en pleine lumière, accentué par l'ombre des orbites et du nez. La fumée de sa cigarette monta, droite, se perdit dans l'intensité de la nuit.
Le mot sadisme, resté dans l'esprit de Claude, y appela un souvenir.
- Un jour, on me mène, à Paris, dans un petit bordel minable. Au salon il y avait une seule femme, attachée sur un chevalet par des cordes, un peu Grand-Guignol, les jupes relevées...
- De face ou de dos ?
- De dos. Autour, six ou sept types : petits bourgeois à cravates toutes faites et vestons d'alpaga (c'était en été, mais il faisait moins chaud qu'ici..." les yeux hors de la tête, les joues cramoisies, s'efforçant de faire croire qu'ils voulaient s'amuser... Ils s'approchaient de la femme, l'un après l'autre, la fessaient - une seule claque chacun - payaient et s'en allaient, ou montaient au premier étage...
- C'était tout ?
- Tout. Et très peu montaient : presque tous partaient. Les rêves de ces bonshommes qui repartaient en remettant leur canotier, en tirant les revers de leur veston...
- Des simples, tout de même...
Perken avança le bras droit, comme pour accompagner d'un geste une phrase, mais hésita, luttant contre sa pensée.
- L'essentiel est de ne pas connaître la partenaire. Qu'elle soit : l'autre sexe.
- Qu'elle ne soit pas un être qui possède une vie particulière ?
- Dans le masochisme plus encore. Ils ne se battent jamais que contre eux-mêmes... A l'imagination on annexe ce que l'on peut, et non ce que l'on veut. Les plus stupides des prostituées savent combien l'homme qui les tourmente, ou qu'elles tourmentent, est loin d'elles : savez-vous comment elles appellent les irréguliers ? Des cérébraux... [...] Et elles ont raison. Il n'y a qu'une seule "perversion sexuelle" comme disent les imbéciles : c'est le développement de l'imagination, l'inaptitude à l'assouvissement. [...]
Encore quinze jours de cette avidité ; quinze jours à attendre sur ce bateau, avec une angoisse d'intoxiqué privé de sa drogue. Il sortit une fois de plus la carte archéologique du Siam et du Cambodge ; il la connaissait mieux que son visage... Il était fasciné par les grandes taches bleues dont il avait entouré les Villes mortes, par le pointillé de l'ancienne Voie Royale, par sa menaçante affirmation : l'abandon en pleine forêt siamoise. "Au moins une chance sur deux d'y claquer..." Pistes confuses avec des carcasses de petits animaux abandonnés près de feux presque éteints, fin de la dernière mission en pays jaraï : le chef blanc, Odend'hal, assommé à coups d'épieux, la nuit, par les hommes du Sadète du feu, dans le bruissement de palmes froissées qui annonçait l'arrivée des éléphants de la mission... Combien de nuits devrait-il veiller, exténué, harcelé de moustiques, ou s'endormir en se fiant à la vigilance de quelque guide ?... On a rarement la chance de combattre... [...]
Se procurer l'ouvrage :
La Voie royale
André Malraux
1930
Grasset
253 pages
Format Kindle : http://www.amazon.fr/La-voie-royale-ebook/dp/B005OPAT8O/r...
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