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lundi, 18 août 2014

Considérations sur l'argent

 

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Le Monde mardi 10 juin 2014

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vendredi, 08 août 2014

Considérations sur l'art et l'argent

 

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Le Figaro, fascicule Le Figaro et vous, mardi 10 juin 2014

 

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jeudi, 31 juillet 2014

Chô

 

les-temps-modernes-charles-chaplin.jpg
Image extraite des Temps Modernes, Charlie Chaplin
http://voiretmanger.fr/temps-modernes-chaplin/

 

Extrait de "243 entreprises regroupent 30% des salariés français", Olivier Auguste, L'Opinion, lundi 28 avril 2014 :

 

[...] Le nombre de demandeurs d'emploi en catégorie A - qui n'ont pas travaillé du tout au cours du mois - [...] atteint 3,349 millions au total, un nouveau sommet. En y ajoutant les catégories B et C (qui ont exercé quelques petits boulots) [...] 4,95 millions [...].

"Les grandes entreprises ne créent plus d'emploi en France." En matière d'économie, voilà sans doute un des clichés les plus tenaces. [...] Or les données actualisés ce mois-ci par l'Insee mettent à mal cette idée reçue. L'Institut de la statistique constate en effet que les 243 "grandes entreprises" implantée en France (soit 0,008% du total des entreprises) représentent à elles seules 4,49 millions de salariés. Pas moins de 30,1% du nombre total de salariés du pays ! Les grandes entreprises sont définies comme comptant au moins 5000 salariés ou réalisant au moins 1,5 milliard d'euros de chiffre d'affaires, indépendamment de leur structure juridique (un groupe avec toutes ses filiales, tous ses sites, compte pour une seule entreprise). A elle seules, elles emploient 50% de personnes en plus que les micro-entreprises (moins de 10 salariés). Mais aussi davantage que les PME (10 à 249 salariés) ou que les entreprises de taille intermédiaire (ETI, 250 à 499 salariés).

Ces chiffres portent sur 2011. Ils sont relativement stables par rapport à ce que l'Insee avait constaté deux années plus tôt. L'Insee notait alors déjà "l'extrême dualité du tissu productif, imputable au poids des grands groupes". "Le secteur le plus concentré est celui des activités financières et des assurance : une trentaine de grandes entreprises y emploient 81% des salariés, précise aujourd'hui l'Institut. L'industrie, ainsi que le secteur de l'information et de la communication, est organisée autour de grandes entreprises et d'ETI [...]. Dans les activités du commerce, des transports, de l'hébergement et de la restauration, les différentes catégories d'entreprises ont un poids proche de la moyenne. En effet, ces activités sont marquées par une grande diversité d'acteurs, des grandes entreprises internationalisées jusqu'aux micro-entreprises qui desservent un marché de proximité. Les PME (y compris micro-entreprises) emploient la majorité des salarié dans les services destinés aux particuliers, l'artisanat commercial (boulangerie, charcuterie, pâtisserie), ainsi que les activités spécialisées, scientifiques et techniques (qui incluent notamment les professions libérales). De même dans la construction, en dépit de la présence d'une petite dizaine de grandes entreprises, les trois quarts des salariés sont employés dans des PME".

La part relative des grandes entreprises dans l'emploi salarié total recule légèrement entre 2009 et 2011. Mais entre ces deux dates, en valeur absolue, elles ont malgré tout créé plus de 500 000 postes - la tendance a pu s'inverser depuis, l'ensemble de l'économie française ayant détruit des emplois en 2012 et 2013. "Il faut de toute façon sortir de l'opposition stérile entre grandes et petites entreprises : par le jeu de la sous-traitance, il y a un effet de ruissellement, les premières permettent de créer des emplois dans les secondes", commente l'économiste Denis Ferrand, directeur général de COE Rexecode.

Autre enseignement des chiffres de l'Insee : un salarié français sur huit travaille pour une entreprise "sous contrôle étranger". Et cette proportion atteint un maximum dans les ETI (29%) et non dans les grandes entreprises (14%). Enfin, un autre élément devrait conduire le gouvernement à choyer les 243 grandes entreprises hexagonales, à l'heure où il cherche à réduire le gouffre du commerce extérieur (plus de 61 milliards de déficit en 2013) : hors secteur financier, elles représentent à elles seules 85% des exportations.

 

emploi.jpg

 

mercredi, 30 juillet 2014

Enrichssez-vous !

 

enrichissez-vous,keynes,guizot
Image extraite des Temps Modernes, Charlie Chaplin
http://voiretmanger.fr/temps-modernes-chaplin/

 

"Enrichissez-vous !", Gaspard Koenig, L'Opinion, lundi 28 avril 2014 :

enrichissez-vous  enrichissez-vous

 

mercredi, 23 juillet 2014

Considérations sur l'argent - Victor Hugo

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Victor Hugo (1802-1885)

 

 Extrait de "Les Pauvres Gens"

                          I

Il est nuit. La cabane est pauvre, mais bien close.
Le logis est plein d'ombre et l'on sent quelque chose
Qui rayonne à travers ce crépuscule obscur.
Des filets de pêcheur sont accrochés au mur.
Au fond, dans l'encoignure où quelque humble vaisselle
Aux planches d'un bahut vaguement étincelle,
On distingue un grand lit aux longs rideaux tombants.
Tout près, un matelas s'étend sur de vieux bancs,
Et cinq petits enfants, nid d'âmes, y sommeillent.
La haute cheminée où quelques flammes veillent
Rougit le plafond sombre, et, le front sur le lit,
Une femme à genoux prie, et songe, et pâlit.
C'est la mère. Elle est seule. Et dehors, blanc d'écume,
Au ciel, aux vents, aux rocs, à la nuit, à la brume,
Le sinistre océan jette son noir sanglot.


                        II

L'homme est en mer. Depuis l'enfance matelot,
Il livre au hasard sombre une rude bataille.
Pluie ou bourrasque, il faut qu'il sorte, il faut qu'il aille,
Car les petits enfants ont faim. Il part le soir
Quand l'eau profonde monte aux marches du musoir.
Il gouverne à lui seul sa barque à quatre voiles.
La femme est au logis, cousant les vieilles toiles,
Remaillant les filets, préparant l'hameçon,
Surveillant l'âtre où bout la soupe de poisson,
Puis, priant Dieu sitôt que les cinq enfants dorment.
Lui, seul, battu des flots qui toujours se reforment,
Il s'en va dans l'abîme et s'en va dans la nuit.
Dur labeur ! tout est noir, tout est froid ; rien ne luit.
Dans les brisants, parmi les lames en démence,
L'endroit bon à la pêche, et, sur la mer immense,
Le lieu mobile, obscur, capricieux, changeant,
Où se plaît le poisson aux nageoires d'argent,
Ce n'est qu'un point ; c'est grand deux fois comme la chambre.
Or, la nuit, dans l'ondée et la brume, en décembre,
Pour rencontrer ce point sur le désert mouvant,
Comme il faut calculer la marée et le vent !
Comme il faut combiner sûrement les manœuvres !
Les flots le long du bord glissent, vertes couleuvres ;
Le gouffre roule et tord ses plis démesurés,
Et fait râler d'horreur les agrès effarés.
Lui, songe à sa Jeannie au sein des mers glacées,
Et Jeannie en pleurant l'appelle ; et leurs pensées
Se croisent dans la nuit, divins oiseaux du cœur.

 

                                 III
Elle prie, et la mauve au cri rauque et moqueur
L'importune, et, parmi les écueils en décombres,
L'océan l'épouvante, et toutes sortes d'ombres
Passent dans son esprit : la mer, les matelots
Emportés à travers la colère des flots ;
Et dans sa gaine, ainsi que le sang dans l'artère,
La froide horloge bat, jetant dans le mystère,
Goutte à goutte, le temps, saisons, printemps, hivers ;
Et chaque battement, dans l'énorme univers,
Ouvre aux âmes, essaims d'autours et de colombes,
D'un côté les berceaux et de l'autre les tombes.

Elle songe, elle rêve.
Et tant de pauvreté !
Ses petits vont pieds nus l'hiver comme l'été.
Pas de pain de froment. On mange du pain d'orge.
Ô Dieu ! le vent rugit comme un soufflet de forge,
La côte fait le bruit d'une enclume, on croit voir
Les constellations fuir dans l'ouragan noir
Comme les tourbillons d'étincelles de l'âtre.
C'est l'heure où, gai danseur, minuit rit et folâtre
Sous le loup de satin qu'illuminent ses yeux,
Et c'est l'heure où minuit, brigand mystérieux,
Voilé d'ombre et de pluie et le front dans la bise,
Prend un pauvre marin frissonnant, et le brise
Aux rochers monstrueux apparus brusquement.
Horreur ! l'homme, dont l'onde éteint le hurlement,
Sent fondre et s'enfoncer le bâtiment qui plonge ;
Il sent s'ouvrir sous lui l'ombre et l'abîme, et songe
Au vieil anneau de fer du quai plein de soleil !

Ces mornes visions troublent son cœur, pareil
À la nuit. Elle tremble et pleure.

 

                              IV  

(…)

 

                               V 

(…)
"Tiens! je ne pensais plus à cette pauvre veuve,
Dit-elle; mon mari, l'autre jour, la trouva
Malade et seule; il faut voir comment elle va."

Elle frappe à la porte, elle écoute; personne
Ne répond. Et Jeannie au vent de mer frissonne.
"Malade ! Et ses enfants ! comme c'est mal nourri !
Elle n'en a que deux, mais elle est sans mari."
Puis, elle frappe encore. "Hé ! voisine !" Elle appelle.
Et la maison se tait toujours. "Ah ! Dieu ! dit-elle,
Comme elle dort, qu'il faut l'appeler si longtemps !"
La porte, cette fois, comme si, par instants,
Les objets étaient pris d'une pitié suprême,
Morne, tourna dans l'ombre et s'ouvrit d'elle-même.

 

                             VI
Elle entra. Sa lanterne éclaira le dedans
Du noir logis muet au bord des flots grondants.
L'eau tombait du plafond comme des trous d'un crible.

Au fond était couchée une forme terrible ;
Une femme immobile et renversée, ayant
Les pieds nus, le regard obscur, l'air effrayant ;
Un cadavre ;
autrefois, mère joyeuse et forte ;
Le spectre échevelé de la misère morte ;
Ce qui reste du pauvre après un long combat.
Elle laissait, parmi la paille du grabat,
Son bras livide et froid et sa main déjà verte
Pendre, et l'horreur sortait de cette bouche ouverte
D'où l'âme en s'enfuyant, sinistre, avait jeté
Ce grand cri de la mort qu'entend l'éternité !

Près du lit où gisait la mère de famille,
Deux tout petits enfants, le garçon et la fille,
Dans le même berceau souriaient endormis.

La mère, se sentant mourir, leur avait mis
Sa mante sur les pieds et sur le corps sa robe,
Afin que, dans cette ombre où la mort nous dérobe,
Ils ne sentissent pas la tiédeur qui décroît,
Et pour qu'ils eussent chaud pendant qu'elle aurait froid.

 

                           VII

(…)

 

                           VIII
Qu'est-ce donc que Jeannie a fait chez cette morte ?
Sous sa cape aux longs plis qu'est-ce donc qu'elle emporte ?
Qu'est-ce donc que Jeannie emporte en s'en allant ?
Pourquoi son cœur bat-il ? Pourquoi son pas tremblant
Se hâte-t-il ainsi ? D'où vient qu'en la ruelle
Elle court, sans oser regarder derrière elle ?
Qu'est-ce donc qu'elle cache avec un air troublé
Dans l'ombre, sur son lit ? Qu'a-t-elle donc volé ?

 

                           IX
Quand elle fut rentrée au logis, la falaise
Blanchissait; près du lit elle prit une chaise
Et s'assit toute pâle; on eût dit qu'elle avait
Un remords, et son front tomba sur le chevet,
Et, par instants, à mots entrecoupés, sa bouche
Parlait pendant qu'au loin grondait la mer farouche.

"Mon pauvre homme ! ah ! mon Dieu ! que va-t-il dire ? Il a
Déjà tant de souci ! Qu'est-ce que j'ai fait là ?
Cinq enfants sur les bras ! ce père qui travaille !
Il n'avait pas assez de peine ; il faut que j'aille
Lui donner celle-là de plus.
C'est lui ? Non. Rien.
J'ai mal fait. S'il me bat, je dirai : Tu fais bien.
Est-ce lui ? Non. Tant mieux. La porte bouge comme
Si l'on entrait.
Mais non. Voilà-t-il pas, pauvre homme,
Que j'ai peur de le voir rentrer, moi, maintenant !"
Puis elle demeura pensive et frissonnant,
S'enfonçant par degrés dans son angoisse intime,
Perdue en son souci comme dans un abîme,
N'entendant même plus les bruits extérieurs,
Les cormorans qui vont comme de noirs crieurs,
Et l'onde et la marée et le vent en colère.

La porte tout à coup s'ouvrit, bruyante et claire,
Et fit dans la cabane entrer un rayon blanc ;
Et le pêcheur, traînant son filet ruisselant,
Joyeux, parut au seuil, et dit : C'est la marine !


                           X
"C'est toi !" cria Jeannie, et, contre sa poitrine,
Elle prit son mari comme on prend un amant,
Et lui baisa sa veste avec emportement
Tandis que le marin disait : "Me voici, femme !"
Et montrait sur son front qu'éclairait l'âtre en flamme
Son cœur bon et content que Jeannie éclairait,
"Je suis volé, dit-il ; la mer c'est la forêt.
Quel temps a-t-il fait ? Dur. Et la pêche ? Mauvaise.
Mais, vois-tu, je t'embrasse, et me voilà bien aise.
Je n'ai rien pris du tout. J'ai troué mon filet.
Le diable était caché dans le vent qui soufflait.
Quelle nuit! Un moment, dans tout ce tintamarre,
J'ai cru que le bateau se couchait, et l'amarre
A cassé. Qu'as-tu fait, toi, pendant ce temps-là ?"
Jeannie eut un frisson dans l'ombre et se troubla.
"Moi? dit-elle. Ah ! mon Dieu! rien, comme à l'ordinaire,
J'ai cousu. J'écoutais la mer comme un tonnerre,
J'avais peur.
Oui, l'hiver est dur, mais c'est égal."
Alors, tremblante ainsi que ceux qui font le mal,
Elle dit : "A propos, notre voisine est morte.
C'est hier qu'elle a dû mourir, enfin, n'importe,
Dans la soirée, après que vous fûtes partis.
Elle laisse ses deux enfants, qui sont petits.
L'un s'appelle Guillaume et l'autre Madeleine ;
L'un qui ne marche pas, l'autre qui parle à peine.
La pauvre bonne femme était dans le besoin."

L'homme prit un air grave, et, jetant dans un coin
Son bonnet de forçat mouillé par la tempête :
"Diable ! diable ! dit-il, en se grattant la tête,
Nous avions cinq enfants, cela va faire sept.
Déjà, dans la saison mauvaise, on se passait
De souper quelquefois. Comment allons-nous faire ?
Bah! tant pis! ce n'est pas ma faute. C'est l'affaire
Du bon Dieu. Ce sont là des accidents profonds.
Pourquoi donc a-t-il pris leur mère à ces chiffons ?
C'est gros comme le poing. Ces choses-là sont rudes.
Il faut pour les comprendre avoir fait ses études.
Si petits! on ne peut leur dire : Travaillez.
Femme, va les chercher. S'ils se sont réveillés,
Ils doivent avoir peur tout seuls avec la morte.
C'est la mère, vois-tu, qui frappe à notre porte;
Ouvrons aux deux enfants. Nous les mêlerons tous,
Cela nous grimpera le soir sur les genoux.
Ils vivront, ils seront frère et sœur des cinq autres.
Quand il verra qu'il faut nourrir avec les nôtres
Cette petite fille et ce petit garçon,
Le bon Dieu nous fera prendre plus de poisson.
Moi, je boirai de l'eau, je ferai double tâche,
C'est dit. Va les chercher. Mais qu'as-tu ? Ça te fâche ?
D'ordinaire, tu cours plus vite que cela.

Tiens, dit-elle en ouvrant les rideaux, les voilà!"

dimanche, 06 juillet 2014

Jean d'Ormesson II

 

*

 

*              *

 

Réconcilier la culture littéraire et la culture scientifique

Le présent change tout le temps mais c'est toujours le présent

Ne meurent que ceux qui ont vécu

J'ai aimé tout ça. Parce que c'était passager

 

*              *

 

*

 

  jean d'ormesson,heloise d'ormesson,comme un chant d'espérance  jean d'ormesson,heloise d'ormesson,comme un chant d'espérance
Sources : http://www.saintmartin89.free.fr/hier/appd.htm
http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/jean-dormesson

 

A propos de "l'habit vert" :
http://www.meselegances.com/2010/02/13/lacademie-les-acad...

 

http://ecolesfm.over-blog.com/article-jean-d-ormesson-jui...

 

 

Le titres est un vers d'Aragon, qui est très beau, "C'est une chose étrange à la fin que le monde, un jour je m'en irai sans avoir tout dit". Et tout est dans "à la fin". A la fin.

Parce que le monde nous est donné comme une espèce d'évidence. On n'y réfléchit pas tous les jours. Vous vous occupez de ne pas rater le train, de faire ce que vous avez à faire, vous vous occupez de vos enfants, de gagner de l'argent, de cultiver vos amours,... Mais le monde, vous vous en occupez pas beaucoup. Et à la fin. A la fin, c'est très étrange.

Vous vous émerveillez de tout, Jean d'Ormesson. Vous vous émerveillez d'être là. Vous dites "Je suis là, rien que ça, c'est extraordinaire".

C'est la clé du livre : c'est l'étonnement d'être là. C'est un sentiment que j'ai éprouvé, vous savez, très très tôt. Je m'en rappelle comme enfant, je m'arrêtais quelques fois de jouer, avec des petits amis, et je me disais "Qu'est-ce que je fais là ?" Et ça me prend très très souvent. A l'Académie, ça me prend très très souvent. "Qu'est-ce que je fais là ?"

Mais ça vous a pris un jour après une belle baignade. Vous vous êtes assis au bord de l'eau, et là vous vous êtes dit "Qu'est-ce que je fais là ?" Vous avez eu envie de ce livre.

Oui, vous savez, ce livre, je l'ai vraiment porté en moi des années et des années. C'est pas parce que maintenant je suis vieux que je m'occupe de Dieu et de la mort. Ça m'a toujours fasciné. Un de mes premiers livres s'appelait Au plaisir de Dieu, j'ai écrit un livre qui s'appelait Dieu, sa vie, son œuvre,  j'ai écrit La création du monde. Cet étonnement devant le monde m'a toujours fasciné.

Vous avez l'impression aujourd'hui de savoir davantage ?

De savoir davantage, peut-être pas. Mais peut-être de me poser des questions, qui sont évidentes : d'où venons-nous ? D'où venons-nous ? Nous savons maintenant d'où nous venons. Vous savez, Aristote ne le savait pas. Aristote pensait que l'univers était éternel. Nous savons maintenant que l'univers a un début. Le big bang n'est pas une certitude, n'est-ce pas, mais c'est l'hypothèse qui est acceptée par l'immense majorité des savants. Mais le big bang ne règle pas tout. Qu'est-ce qui avait avant le big bang ?

Vous vous posez de drôles de questions.

Oui. Je ne vais pas vous dire que j'apporte les réponses. Je ne vous dirai pas ce qu'il y avait avant le big bang. Et je ne vous dirai pas ce qu'il y a après notre mort. Mais peut-être la façon de poser les questions est déjà une espèce d'apaisement.

Oui, alors, évidemment, il y a les philosophes, il y a tous ceux qui ont cherché, à travers la littérature, à travers la philosophie, mais aussi les scientifiques, et quelque part aussi ils sont des poètes.

Vous avez tout à fait raison. J'ai essayé de réconcilier, dans ce livre - qui est très facile à lire, je crois qu'un enfant de dix ans peut lire ce livre -, j'ai essayé de réconcilier la culture littéraire et la culture scientifique. Les littéraires ne savent presque rien de la science. Moi je ne savais presque rien. J'ai un peu travaillé. Et les scientifiques connaissent mal la littérature. Alors que les deux choses sont mêlées. Homère et Platon sont inséparables de Pythagore et d'Euclide. Et je dirais que dans cet extraordinaire vingtième siècle, il y a eu bien sûr Gide, Joyce, Proust, Hemingway, mais il y a eu aussi Hemingway - euh - Einstein, Bore, Freulinger, qui sont des gens..., Heisenberg, qui sont des gens qui ont changé notre monde, changé le monde. Et alors, évidemment, à l'étonnement, à l'étonnement se mêle pour moi quelque chose d'un peu vieillot, d'un peu ringard peut-être.

Oh, assumez alors.

Que j'assume, que j'assume. Vous voyez bien que dans le monde où nous vivons, l'ironie règne, la dérision règne, on ne croit plus à grand chose. Et moi je nourris beaucoup d'admiration. D'admiration pour les hommes, pour les œuvres,... pour la vie ! Pour le fait que le soleil se lève, que la nuit arrive, tout ça me paraît des choses extraordinaires. Que nous acceptons, comme ça, comme si c'était tout à fait naturel. C'est stupéfiant. Et c'est pour ça que j'ai appelé le livre - on me l'a reproché -, que j'ai appelé le livre "roman". Parce qu'il semble que cette extraordinaire aventure du monde, de la vie et, au-delà de la vie, de l'univers, est un extraordinaire roman.

Il y a beaucoup de choses évidemment dans ce..., vous vous interrogez, évidemment sur Dieu, sur la vie, l'émerveillement de toute chose, le présent. A un moment, vous dites "le présent est comme une prison de verre".

Oui, le présent est quelque chose d'extraordinaire. Tous les hommes, depuis qu'ils existent, ont vécu dans le présent. Ils ont vécu dans un éternel présent, qui n'a jamais été le même ! N'est-ce pas, le présent change tout le temps mais c'est toujours le présent. Et il y a cette chose extraordinaire qu'est le passé. Où est le passé ? où est-il ? Est-ce qu'il a complètement disparu ? Ou est-ce qu'il est quelque part ? Vous savez, c'est quand même... Ce livre, il n'est pas un livre religieux.

Mais vous interrogez "Qui est Dieu". Vous dites "Dieu est le temps. Et le temps est les hommes".

Je crois que le temps, ce temps, ce temps extraordinaire, d'où nous sortirons, ce temps est quelque chose d'incroyablement compliqué. L'avenir, où est l'avenir ? On ne sait pas. Mais il arrive. Et, vous savez, saint Augustin, il y a deux millénaires et demi, disait "Si tu ne me demandes pas ce qu'est le temps, je sais ce que c'est. Dès que tu me demandes ce qu'est le temps, je ne sais plus ce que c'est". Et Hawkin - Hawkin, vous savez, c'est cet astronome qui est entièrement paralysé, qui ne peut bouger qu'un doigt, et qui communique par ordinateur -, Hawkin dit "Il est impossible de dire de quoi est composé le temps". Il me semble qu'il y a, dans le temps, quelque chose du mystère divin.

Et derrière tout ça, il y a la vie. Parce que vous l'aimez tant !

Oui, je l'aime beaucoup.

Et vous aimez tellement la vie que vous n'avez pas peur de la mort.

Non. Pas du tout. La mort fait partie de la vie. Vous savez, ne meurent que ceux qui ont vécu. C'est une chance merveilleuse de mourir. Ça prouve que vous avez vécu. Moi qui ait tant aimé la vie, j'ai beaucoup aimé la vie, j'ai eu beaucoup de chance, vous savez, dans la vie, et si on me proposait de recommencer, je crois que je refuserais.

Ah bon ?

Ah oui, je refuserais.

Vous refuseriez les descentes en ski que vous aimez tant, les baignades en Grèce ?

J'ai aimé tout ça. Parce que c'était passager. Et si je ne mourais pas, ce serait atroce. Je pense qu'il n'y a pas pire punition que le juge ferrant qui n'arrive pas à mourir. L'immortalité, c'est une horreur, une horreur ! Grâce à Dieu, nous mourrons.

 

 

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C'est une chose étrange à la fin que le monde

Jean D'Ormesson

2010 puis 2011

Robert Laffont puis Pocket

282 pages

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mardi, 03 juin 2014

Considérations sur l'argent - Patrick Duchez

 

les petites gens - image du film Jane Austen.JPG

 

Source : http://arcaneslyriques.centerblog.net/2227425-Les-petites-gens

 

"Les petites gens", 2005, Partick Duchez


Ils donnent un bonjour plein de timidité
Et fixent en marchant la pointe de leurs pieds
Pour avoir toujours dû garder le dos voûté
Devant ceux qui prenaient plaisir à les ployer.

Ils comptent leur monnaie en faisant attention
Car le sou oublié pourrait bien leur manquer
Pour ce mois bien trop long pour la maigre pension
Assurant simplement une vie étriquée.

Ils voyagent parfois sur des cartes postales
Qu’ils reçoivent l’été de leurs voisins partis
Et gardent leur maison, simple geste amical,
Sans jamais demander une contrepartie.

Leurs vacances ne sont que des jours au jardin,
Des balades le soir à la belle saison
Ou devant leur écran pour voir des baladins
Leur montrer des pays plus loin que l’horizon.

Leur demeure est pleine de petits bibelots
Souvenirs des instants où la vie a souri,
La statue de la foire en forme d’angelot
Et des cadres montrant quelques photographies.

Ils pensent l’avenir en payant sou à sou
Un tombeau ouvragé en marbre d’Italie
Où ils reposeront ayant été absous
Et avoir une mort plus belle que la vie.