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dimanche, 22 juin 2014

Jean d'Ormesson I

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Le Dieu des chrétiens est le seul qui s'incarne par amour
L'amour est la grande nouveauté du christianisme

Nous vivons dans une parenthèse miraculeuse, qui a un commencement et aura une fin

La science et la foi ne sont pas du tout incompatibles

Le mal est indissociable de la conscience du mal
Il procède de l'homme, de sa responsabilité, c'est-à-dire de la liberté de faire le mal


 

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Sources : http://www.saintmartin89.free.fr/hier/appd.htm
http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/jean-dormesson

 

A propos de "l'habit vert" :
http://www.meselegances.com/2010/02/13/lacademie-les-acad...

 

"Croire en Dieu, on aurait tort de s'en priver...", entretien de Jean d'Ormesson (académicien) par Etienne de Montety - edemontety@lefigaro.fr -, Le Figaro, fascicule Le Figaro et vous, jeudi 12 juin 2014

 

En 1980, Jean d'Ormesson écrivait Dieu, sa vie, son œuvre. En 2014, son panthéisme joyeux s'est transformé en action de grâces. Il publie Comme un chant d'espérance : un court livre où l'écrivain fait part de son émerveillement et de sa stupéfaction face au mystère de l'univers. Il le fait avec brio, comme à son habitude. Commencé comme un court traité de cosmologie, le livre tourne vite à la quête de Dieu. Ce Dieu-là n'est pas celui qui régnait en maître chez ses grands-parents à Saint-Fargeau, il y a cent ans ; c'est une Personne plus insaisissable et plus riche à la fois : l'auteur des beautés de la Création, et celui qui donne la vie et la joie. Et ce Dieu, Jean d'Ormesson l'avoue, l'émeut chaque jour davantage.

A quand remonte votre intérêt pour Dieu ?
Mon livre traite de Dieu, non pas parce que je vieillis, mais parce que ce sujet m'intéresse depuis longtemps. J'ai été élevé dans la religion catholique. Généralement, quand les gens disent ça, c'est pour mieux s'en démarquer. Ce n'est pas mon propos. Je ne suis jamais allé au catéchisme, hormis quelques mois au cours Bossuet, c'est ma mère qui m'a transmis la foi. Enfant, j'ai lu et relu l'Histoire sainte. Je revois mon père, qui était un catholique de gauche, me disant : est-ce bien vrai, tout ça ? Sa remarque m'ouvrit un abîme de perplexité. Je n'ai jamais été très pieux, mais face au mystères de l'existence, j'ai toujours manifesté un sentiment d'étonnement. Je suis étonné d'être en vie, je n'en reviens pas que le soleil se lève le matin ; je suis stupéfait d'écouter l'andante du Concerto 21 de Mozart. L'éternité, le temps, l'histoire me remplissent d'étonnement.

Avez-vous conservé ma foi de votre enfance ?
A trente ans, j'étais toujours dans le même état d'esprit, mais toujours aussi peu pieux : je célébrais Dieu dans sa création. Si j'étais né aztèque, je crois que j'aurais été un adorateur du Soleil. Je trouvais des raisons de croire en découvrant la lumière du matin sur la Méditerranée, dans les calanques de Porto, en Corse, mais aussi en séjournant à Palmyre, à Rome, à Venise, à Damas, devant la mosquée des Omeyyades. Face au mystère de la création, il m'a toujours paru impossible de s'en tenir aux certitudes. Mes doutes m'embarrassaient, me paralysaient jusqu'à ce que j'apprenne que les plus grands saints ont douté. Ainsi Mère Teresa elle-même a connu des périodes de doutes profonds. Léon Bloy a raison : il n'y a qu'une tristesse, c'est de ne pas être un saint. Mais un saint n'est pas un être parfait !

Pas pieux, donc, mais croyant...
Je n'accorde pas une grande importance à l'astrologie, mais je note que je suis Gémeaux, signe de la dualité. Je suis gaulliste et européen, de droite mais assez à l'aise avec des hommes de gauche comme Mitterrand et Mélenchon. Et je suis catholique et agnostique. Songez que lorsque j'assiste à une messe, je suis volontiers un peu ironique. Mais je ne supporte pas qu'on critique la foi catholique devant moi. De nombreux auteurs me confortent dans cette position ambivalente. Il y a une histoire célèbre chez les juifs, ce sont deux rabbins qui se disent : "L'important c'est Dieu, qu'il existe ou non." Un Père de l'Eglise dit par ailleurs : ma foi est la forme de mon espérance. C'est exactement mon cas.

Alors à quoi croyez-vous précisément ?
Ce qui ne laisse pas de m'étonner et de m'émerveiller, c'est l'Incarnation : Dieu s'est fait homme.
Je sais bien, avec Renan, que dans de nombreuses religions anciennes, les dieux prennent forme humaine : Zeus prit les traits d'Amphitryon pour séduire Alcmène. Mais le Dieu des chrétiens est le seul qui s'incarne par amour. L'amour est la grande nouveauté du christianisme qu'on retrouve dans d'innombrables propos du Christ : "Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés", etc. Les chrétiens le savent : quand il font le bien, c'est à l'imitation de Dieu mais je suis rempli d'admiration pour les non-chrétiens qui font eux aussi le bien.

Votre livre montre cependant que votre approche de Dieu procède plutôt de la science que la foi
Le XXe siècle a été un siècle horrible à cause des guerres et des massacres. Et un siècle magnifique à cause de la science. On y fait des découvertes exceptionnelles notamment concernant les origines de l'Univers, de Planck à Hubble. La réflexion sur l'univers est proprement saisissante : nous vivons sur une scène, coincés entre le mur de Planck qui donne le départ de l'Univers et celui de la mort. Nous vivons dans une parenthèse miraculeuse, qui a un commencement et aura une fin.

Tous ces scientifiques nous éclairent sur la façon dont a pu se construire l'Univers. Mais pourquoi tout ceci a-t-il été créé ?
Ça relève de la foi. "Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? demandait Leibnitz. Or la nécessité de l'Univers n'est pas nécessaire. D'ailleurs, la science et la foi ne sont pas du tout incompatibles. Il est loin, le temps où Bertrand Russel pouvait, après une longue discussion sur l'existence de Dieu, couper court en disant : "Vous ne m'avez pas donné assez de preuves..." Croire en Dieu, c'est beaucoup plus simple que de ne pas y croire, et c'est beaucoup plus encourageant. On aurait tort de s'en priver !

Il y a le mal qui est un mystère et un scandale, qui peut faire douter de Dieu.
Oui, mais le mal est arrivé avec l'homme et avec la pensée. Avant l'homme, le mal n'existe pas. Il y a la souffrance, mais pas le mal. Le mal est l'apanage de l'homme. Car le mal est indissociable de la conscience du mal. Il procède de l'homme, de sa responsabilité, c'est-à-dire de la liberté de faire le mal. Le mal est le prix de notre liberté. Dieu n'est pour rien là-dedans.

Et l'Eglise catholique dans tout ça, comment la trouvez-vous ?
Les ricaneurs sont nombreux qui cirent Loisy : "Jésus annonçait le royaume, mais c'est l'Eglise qui est venue"... Or la succession de trois papes, Jean-Paul II, Benoît XVI et François, chacun illustrant à sa manière les trois vertus thoélogales, l'espérance, la foi et la charité, montre la caractère durablement exceptionnel de l'Eglise catholique, et ce depuis deux mille ans. Je mourrai dans son sein si elle veut de moi et j'aimerais bien avoir un prêtre à mes côtés.

 

 

jean d'ormesson,heloise d'ormesson,comme un chant d'espéranceSe procurer l'ouvrage :

Comme un chant d'espérance

Jean D'Ormesson

2014

Editions Héloïse d'Ormesson

160 pages

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jean d'ormesson,heloise d'ormesson,comme un chant d'espéranceSe procurer l'ouvrage :

Dieu, sa vie, son oeuvre

Jean D'Ormesson

1980, 1981

Gallimard, blanche

496 puis 504 pages

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mardi, 03 juin 2014

Considérations sur l'argent - Patrick Duchez

 

les petites gens - image du film Jane Austen.JPG

 

Source : http://arcaneslyriques.centerblog.net/2227425-Les-petites-gens

 

"Les petites gens", 2005, Partick Duchez


Ils donnent un bonjour plein de timidité
Et fixent en marchant la pointe de leurs pieds
Pour avoir toujours dû garder le dos voûté
Devant ceux qui prenaient plaisir à les ployer.

Ils comptent leur monnaie en faisant attention
Car le sou oublié pourrait bien leur manquer
Pour ce mois bien trop long pour la maigre pension
Assurant simplement une vie étriquée.

Ils voyagent parfois sur des cartes postales
Qu’ils reçoivent l’été de leurs voisins partis
Et gardent leur maison, simple geste amical,
Sans jamais demander une contrepartie.

Leurs vacances ne sont que des jours au jardin,
Des balades le soir à la belle saison
Ou devant leur écran pour voir des baladins
Leur montrer des pays plus loin que l’horizon.

Leur demeure est pleine de petits bibelots
Souvenirs des instants où la vie a souri,
La statue de la foire en forme d’angelot
Et des cadres montrant quelques photographies.

Ils pensent l’avenir en payant sou à sou
Un tombeau ouvragé en marbre d’Italie
Où ils reposeront ayant été absous
Et avoir une mort plus belle que la vie.

 
 
 

mardi, 27 mai 2014

Considérations sur la mémoire - La guerre à neuf ans

 Guernica, Picasso

 

Préface d'Emmanuel Berl à La guerre à neuf ans, Pascal Jardin, 1971, Grasset :

 

J'ai connu Pascal Jardin, plongé encore dans cette enfance dont il dit qu'on ne sort jamais.

Il m'a toujours séduit, et tant de fois déconcerté qu'il ne peut plus me surprendre, - par ses apparitions, ses disparitions ; petit ange démoniaque, tendre et dur, esclave ou libre, plus que quiconque : avec ses pieds qui ne touchent pas la terre et y sont, néanmoins, enfoncés.

J'ai aimé son livre, dès sa première version - parce qu'il lui ressemble. Est-il bon ? Est-il mauvais ? Comment savoir. En tout cas, il n'est pas rien. Pour moi, cela seul importe. Les livres sont comme les gens, transparents ou opaques, on entre en eux ou on n'y entre pas. Quand on les juge, on se trompe, non seulement sur eux, mais sur soi.

Celui-ci m'a intéressé pour des raisons multiples.

"La guerre à neuf ans" ? Moi, j'en avais quarante-huit. J'ai vu beaucoup des choses qu'il raconte. Et je ne les reconnais pas. Mais Cézanne aurait-il reconnu Vollard dans le portrait qu'en a peint Picasso ?

Pascal Jardin lui-même a-t-il vu, comme il le dit, ce qu'il nous rapporte ? Je sais trop que la mémoire est une fermentation perpétuelle où les souvenirs se transforment autant qu'ils se conservent.

C'est le cas de chacun. Mais de Pascal Jardin, plus particulièrement : il regarde tout avec tant de passion qu'il modifie tout de suite ce que, chez les autres, modifie, goutte à goutte, le temps écoulé.

Je crois que personne n'est plus véridique, et plus sincère. Mais je suis moi-même étonné quand, par hasard, il m'arrive de croire ou même de vérifier ce qu'il dit.

Chez lui, plus que chez quiconque, la perception, la mémoire ou l'imagination sont un tout que nos pédantismes, abusivement, décomposent.

Il est exactement le contraire de Cocteau "menteur qui disait toujours la vérité".

Pascal, lui, est toujours vrai, quitte à dire des mensonges : il serait, je pense, incapable de mentir. Si la vérité se transmue en imposture, la faute en est à elle, non à lui.

Il serait bien que M. Jacques Monod le fréquente un peu. Ses idées sur "la connaissance objective" y gagneraient le flou, les réserves qui leur manquent.

Sans doute M. Monod répondrait qu'il est un homme de science, et Pascal Jardin, un homme de cinématographe ; et que le laboratoire permet les vérifications expérimentales ; le retour du même prouve la justesse du discours tenu sur lui, oppose ce qui réussit à ce qui échoue.

Mais Pascal Jardin réussit : le scénario vérifie l'imaginaire d'où il provient, ou le film vérifie le scénario qu'il projette. La connaissance objective ne serait donc qu'un certaine attitude morale de celui qui tend vers elle. M. Monod lui-même, d'ailleurs, l'insinue. La guerre, l'enfance, Vichy, la première et la seconde femme de Pascal Jardin existent.

Son album d'images ne concorde pas toujours avec le mien. Mais n'était-il, n'est-il pas mieux placé que moi pour prendre ses photos ? Il est moins assuré que M. Monod de ce qu'il a vu, de ce qu'il se rappelle, de ce qu'il dit. Mais cette méfiance diminue-t-elle la probabilité de ses propos ?

Le cerveau de Pascal Jardin constitue un certain système de coordonnées. Il arrive que ses personnages m'ébahissent, quand je me réfère à ma propre souvenance. Mais la physique n'a-t-elle pas toujours ébahi le public, assuré que le soleil tourne autour de la terre, que l'espace est un milieu homogène, éternel, et que la vitesse de la lumière ne peut pas être constante, puisque les corps se meuvent soit dans le même sens qu'elle, soit dans un sens opposé ?

Je ne serai sans doute pas le seul que le livre de Pascal Jardin rappelle à l'ordre de la modestie. Il y parvient du premier coup, en nous obligeant à considérer que la guerre pourrait être vue, par des enfants - fait trop méconnu par les adultes inguérissables que sont les historiens.

Ils gagneront tous à méditer la scène où l'enfant Pascal cherche à comprendre ce que peut avoir d'insolite la présence simultanée, dans le salon de son père, de M. K. von Nidda, en visite et de Robert Aron en cavale.

De même qu'à relire dans Les dieux ont soif celles où Anatole France montre des Parisiens, inconscients qu'un événement a lieu, le neuf thermidor.

Les psychiatres aussi gagneront à lire ce que Pascal Jardin écrit des bottes et de son rapport avec elles. [...]

 

 

pascal jardin, la guerre à neuf ans, à 9 ansSe procurer l'ouvrage :

La guerre à neuf ans

Pascal Jardin

1971

Grasset

198 pages

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vendredi, 21 mars 2014

La mélodie du tic-tac

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Extrait de La mélodie du tic-tac et autres bonnes raisons de perdre son temps, Pierre Cassou-Noguès, 2013, Flammarion :

 

Un philosophe qui traîne

 

Je reprends entièrement à mon compte la formule de Merleau-Ponty, qu'il emprunte à Husserl mais à laquelle il donne toute sa portée, selon laquelle la tâche de la philosophie est de porter l'expérience à l'expression. La philosophie est essentiellement descriptive. Il s'agit de rendre dans le langage l'expérience ou, disons, la vie. La vie, non pas comme on oppose la vie et la mort, le vivant et l'inerte, mais au sens où l'on dit "dans la vie" ou "c'est la vie".

Pourquoi alors la philosophie ? Parce que la vie, telle qu'elle est donnée dans le langage courant, fait problème. Le langage dont nous disposons, les textes classiques que nous avons étudiés à l'école, les journaux, la conversation de tous les jours, semblent laisser échapper quelque chose de la vie, qu'il reste donc à essayer d'écrire. C'est ce à quoi le philosophe s'attache. Et, dans cet effort, il rencontre non seulement des questions de mots - il lui faut trouver une façon de raconter les scènes qui lui importent - mais aussi des question de concepts : il reste des éléments de la vie, qui n'entrent pas dans les catégories véhiculées dans la langue courante. Sans doute, la distinction entre questions de mots et questions de concepts est une affaire de degré. L'effort de trouver les mots conduit au niveau des concepts : des termes généraux qui permettent d'analyser et, par conséquent, de décrire les scènes de la vie. Bien décrire, c'est comprendre. La description du philosophe ne fait donc pas l'économie des concepts. Elle est confrontée aussi à des problèmes, et peut-être pas toujours aux même problèmes qu'ont rencontrés les philosophes qui précèdent, la justice, la liberté, la subjectivité : que suis-je et comment en viens-tu, en vient-on, à être je ?

Ce n'est pas dire que la philosophie soit dirigée par ces problèmes, qu'elle ait pour tâche de répondre aux problèmes qui lui a laissés la tradition, ou simplement de les reprendre. C'est dans son effort de décrire l'expérience qu'elle peut retomber sur les problèmes classiques, comme elle peut découvrir de nouvelles questions, de nouveaux angles d'attaque sur la vie.

La philosophie n'est pas non plus dirigée par l'idée de vérité. Elle n'a pas pour but de produire des énoncés vrais. Du moins, la description du philosophe n'est pas tenue d'être vraie dans le sens où un article dans le journal, le bulletin météorologique par exemple, est dit "vrai" : je vérifie d'un coup d’œil par la fenêtre s'il pleut comme l'annonce le journal. En fait, le texte philosophique n'est jamais lu de cette façon. Lorsque, dans les Méditations, Descartes se présente en robe de chambre près du feu jouant avec un morceau de cire, personne (dans son bon sens) ne songe à demande si cette description est exacte. Cela n'importe aucunement. La description de la vie, dans laquelle s'engage le philosophe, peut bien passer par la fiction. La meilleure façon de décrire la vie, d'isoler ces moments qui font problème peut bien être d'évoquer une scène qui n'a jamais eu lieu ou ne pourrait même jamais avoir lieu.

Plus profondément, la mise à l'écart de l'idée de vérité tient à ce que l'usage que nous faisons du terme dans la vie ordinaire, à propos du bulletin météorologique par exemple, suppose une adéquation bien établie entre le langage courant et des éléments de l'expérience. Nous savons à quoi doit répondre dans le paysage la prévision météorologique : à quelles conditions nous pourrons dire qu'il pleut. Mais le philosophe s'attache précisément à ce qui dans la vie échappe à ce langage bien défini. Le philosophe peut parler de la pluie, Bachelard l'a fait. Mais ce qui l'intéresse dans la pluie ne s'exprime pas dans le bulletin météorologique, ne se décrit pas, ou se décrit mal, et, pour cette raison même, nous ne savons pas encore bien le voir. Peut-être la description que tente le philosophe peut entrer après coup dans le langage commun et s'y fixer et prendre alors une vérité dans le même sens que le bulletin météorologique. Dans ce cas, d'un concept psychologique qu'invente un philosophe, ou un écrivain, ou de la description même d'un élément comme la pluie, nous pourrons dire rétrospectivement qu'ils sont vrais. Mais il faut qu'ils soient lentement entrés dans un usage courant pour acquérir une vérité qu'ils n'avaient pas au moment où ils se sont d'abord énoncés. Et il faut aussi que nous oubliions qu'ils ont pu être mis en place dans une fiction, une scène qui n'avait pas de répondant dans la réalité. Les énoncés du philosophe ne son jamais simplement vrais.

Il est possible de chercher à modifier le concept de vérité pour y rattacher cette philosophie descriptive. C'est ce que tente Merleau-Ponty. Mais, à mes yeux, il vaut mieux l'abandonner entièrement et conserver à la description philosophique la liberté qu'elle a dans son énonciation première, le plus souvent fictive. La description du philosophe alors n'est pas soumise à la question de la vérité. Elle doit seulement fonctionner. Il s'agit d'y adhérer comme à n'importe quelle fiction. Il y a des fictions qui marchent, que nous suivons avec intérêt, et des fictions qui ne marchent pas. C'est ce seul critère, immanent à la fiction, qui importe.

Dirigée par cet effort descriptif, la philosophie n'est pas non plus assujettie à l'ordinaire, ni au langage ordinaire ni à la vie ordinaire. En réalité, l'ordinaire auquel renvoient parfois les philosophes, recouvre une abstraction. Il s'appuie sur ce qu'il entend éliminer. L'appel à l'ordinaire, la description de l'ordinaire ne sont jamais eux-mêmes ordinaires. Comment le seraient-ils ? Dans l'idée d'engager à rapporter les problèmes philosophiques au langage ordinaire, Wittgenstein par exemple se lance dans des expériences de pensée qui n'ont rien d'ordinaire mais font écho à la littérature fantastique. Le philosophe emprunte, qu'il le reconnaisse ou non, à toute une littérature qui dépasse l'ordinaire. Il est donc amené à l'ordinaire et organise ce plan en référence à un extraordinaire qu'il entend écarter et qui reste un soubassement refoulé mais toujours actif. Le passer sous silence, c'est tomber dans l'abstraction.

La vie, telle que nous la recevons d'abord, est sous-tendue par l'extraordinaire, puisque nous avons toujours déjà entendu des contes, été nourris d'une littérature fantastique. Il s'agit d'interroger cet extraordinaire et de le réactiver par la fiction. Finalement, la méthode n'est pas très différente de ce que Husserl appelait l'intuition eidétique. Les différentes dimensions des éléments de la vie se dévoilent par une sorte de variation imaginaire, dans des fictions dont certaines pourraient se produire dans le réel tandis que d'autres le débordent tout à fait. Il s'agit ainsi d'isoler, de décrire, de comprendre autant que possible, de reprendre dans un langage aussi transparent que possible des noyaux de sens, des invariants de la vie.

 

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A lire également, dans Libé Livres :

http://www.liberation.fr/livres/2013/09/25/entretenir-la-...

 

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Et pour un entretien sur France Musique :

http://www.dailymotion.com/video/x158m3q_pierre-cassou-no...

 

 

 

pierre cassou noguesSe procurer l'ouvrage :

La mélodie du tic-tac et autres bonnes raisons de perdre son temps

Pierre Cassou-Noguès

2013

Flammarion

301 pages

http://www.amazon.fr/m%C3%A9lodie-tic-tac-autres-bonnes-r...

 

 

 

vendredi, 07 mars 2014

Freakonomics

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Extraits de Freakonomics, Steven D. Levitt (professeur d'économie à l'université de Chicago) & Stephen J. Dubner (journaliste au New York Times et au New Yorker), New York 2005, traduit par Anatole Muchnik en 2007, Folio, édition revue et augmentée : 

Quatrième de couverture :

Quel lien entre la législation de l'avortement et la baisse de la criminalité aux Etats-Unis ? Quelles sont les vraies motivations des agents immobiliers ? Pourquoi les revendeurs de drogue vivent-ils plus longtemps chez leur mère ?

L'économie, vue sous cet angle, incongru en apparence, mais qui est celui de la plus sérieuse rationalité des agents, des comportements, des causes et effets, traite de sujets peu conventionnels. Elle a reçu un nom : freakonomics, ou "économie saugrenue".

Elle jette une lumière de biais sur le désordre des événements ; elle met à nu des a priori à prétention de scientificité irréfutable ; elle transforme notre regard sur le monde globalisé, qui nous apparaît, pour finir, moins impénétrable et incompréhensible. 

 

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P. 13 à 16 :

A l'été 2003, le New York Times Magazine a envoyé Stephen J. Dubner, écrivain et journaliste, réaliser un portrait de Steven D. Levitt, un jeune économiste de l'université de Chicago dont tout le monde parlait.

Dubner avait récemment eu l'occasion d'interviewer plusieurs économistes, dans le cadre de ses recherches pour un livre sur la psychologie de l'argent, et le journaliste trouvait qu'ils parlaient souvent une autre langue que le reste du monde. De son côté, Levitt, fraîchement décoré de la médaille John-Bates (qui récompense tous les deux ans le meilleur économiste américain de moins de quarante ans), avait été interrogé par d'innombrables journalistes, et pour lui, leur pensée n'était pas très... solide, comme dirait un économiste.

Mais Levitt a trouvé que Dubner était loin d'être un idiot consommé. Et Dubner s'est dit que Levitt n'était pas une règle à calcul d'apparence humaine. Ce qui fascinait le journaliste, c'était à la fois l'inventivité des travaux de l'économiste et son talent pour les expliquer. Malgré son curriculum vitae (études à Harvard, doctorat au MIT, récompenses à la pelle), Levitt avait une façon particulièrement peu orthodoxe d'aborder l'économie. Le regard qu'il portait sur ce qui l'entourait n'était pas très académique, n'était plutôt celui d'un explorateur aussi malin que curieux - un réalisateur de documentaire, peut-être, ou un médecin légiste, ou un bookmaker qui prendrait des paris aussi bien sur le sport que sur la criminologie en passant par la culture pop. Il ne montrait que peu d'intérêt pour les questions monétaires qui viennent à l'esprit aussitôt que l'on songe à l'économie, et affichait une modestie frôlant l'autodénigrement : "Je ne connais pas grand-chose à l'économie", a-t-il prévenu Dubner, rejetant la mèche qui lui barrait les yeux. "Je ne suis pas bon en maths, je ne fais pas beaucoup d'économétrie, et je ne sais pas faire de théorie. Vous ne pouvez pas me demander si la Bourse va monter ou descendre, si la croissance va se poursuivre, si la déflation est souhaitable ou pas ; si vous m'interrogez sur les impôts, je ne peux décemment pas vous raconter que j'y entends quoi que ce soit, ce serait une escroquerie totale."

Ce qui intéressait Levitt, c'étaient les petites énigmes de la vie quotidienne. Ses travaux avaient de quoi faire le délice de quiconque s'intéresse aux mille petits faits du quotidien. Cette approche peu commune transparaît dans l'article de Dubner :

Par une fin de matinée ensoleillée de la mi-juin, le plus brillant des jeunes économistes américain - du moins reconnu comme tel par un jury composé de ses aînés - s'arrête à un feu rouge, dans le sud de Chicago. Il est au volant d'une vieille Chevrolet Cavalier verte au tableau de bord poussiéreux et dont une vitre ne ferme plus tout à fait, ce qui provoque une molle vibration à chaque fois que l'on prend un peu de vitesse.

Mais pour l'heure, la voiture est silencieuse, comme le sont les rues à midi dans ce paysage de stations-service, de béton à perte de vue, et d'immeubles de brique aux fenêtres en contreplaqué.

Un sans-abri entre deux âges approche de l'automobile. Si on sait qu'il est sans-abri, c'est parce que c'est écrit sur sa pancarte, où il réclame aussi de l'argent. Il porte une veste déchirée, trop chaude pour la saison, et une casquette de baseball crasseuse.

L'économiste ne verrouille pas ses portières, il ne fait pas avancer son véhicule de quelques centimètres pour échapper au face-à-face. Mais il ne fouille pas non plus ses poches à la recherche d'un peu de monnaie. Il se contente de l'observer, comme s'il se trouvait derrière une glace sans tain. Au bout d'un moment, le sans-abri s'éloigne.

"Pas mal, ses écouteurs", dit l'économiste, suivant l'autre du regard dans le rétroviseur. "Meilleurs en tout cas que les miens. A part ça, il n'avait pas l'air de posséder grand-chose."

Steven Levitt ne voit pas les choses comme le commun des mortels. Ni comme le commun des économistes, d'ailleurs. Mais cela peut aussi bien passer pour une qualité que pour un défaut, selon l'estime que l'on porte aux économistes en général.

Pour Levitt, l'économie est une science dont les outils sont excellents pour obtenir des réponses, mais qui manque cruellement de questions dignes d'intérêt. Tout son talent consiste à savoir poser ces questions. Par exemple : si les dealers de drogues gagnent autant qu'on le dit, pourquoi habitent-ils toujours chez leur mère ? Quel est le plus dangereux, une arme à feu ou une piscine ? Qu'est-ce qui a réellement provoqué l'effondrement du taux de criminalité dans la dernière décennie ? Les agents immobiliers ont-ils le souci sincère de l'intérêt de leurs clients ? Pourquoi les parents noirs donnent-ils à leurs enfants des prénoms qui risquent de pénaliser leur carrière ? Est-il possible que des enseignants trichent pour améliorer le taux de réussite de leurs élèves ? Les compétitions de sumo sont-elles truquées ?

Et comment se peut-il qu'un sans-abri en guenilles possède un casque à 50 dollars ?

Beaucoup - jusque parmi ses confrères - jugeront que le travail de Levitt ne relève pas du tout de l'économie. Il a pourtant ramené la "science funeste" à sa fonction première : celle d'expliquer comment les individus obtiennent ce qu'ils désirent. Contrairement à la plupart des universitaires, il n'hésite pas à émettre des commentaires personnels ni à céder à sa propre curiosité ; il ne déteste pas non plus les anecdotes ni les récits (mais le calcul, oui). C'est un intuitif. IL décortique des montagnes de données pour y déceler ce que les autres n'ont pas vu. Il trouve le moyen de mesurer un efet que des économistes chevronnés ont pourtant déclaré immensurable. Ce qui l'intéresse pus que tout - bie qu'il prétende ne jamais s'y être adonné lui-même -, c'est la tromperie, la corruption et le crime.

 

A consulter également : http://freakonomics.com/

 

freakonomics, steven levitt, stephen dubnerSe procurer l'ouvrage :

Freakonomics

Steven D. Levitt, Stephen J. Dubner

2007

Folio, coll. actuel

352 pages

http://www.amazon.fr/Freakonomics-Stephen-J-Dubner/dp/207...

 

 

mardi, 04 mars 2014

Normal

 

"L’idée d’un homme normal est un mythe semblable au mythe nazi."

 

maurice, merleau ponty
Maurice Merleau-Ponty (1908-1961)

http://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Merleau-Ponty

 

 

lundi, 11 novembre 2013

Après l'orgie, la simulation par fractale - Jean Baudrillard (il y a plus de vingt ans)

 

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Crédits photographiques Sylvia El Aarabi 

 

Extrait de La Transparence du Mal, 1990, Jean Baudrillard, Galilée (pp 11 à 16) :

 

S'il fallait caractériser l'état actuel des choses, je dirais que c'est celui d'après l'orgie. L'orgie, c'est tout le moment explosif de la modernité, celui de la libération dans tous les domaines. Libération politique, libération sexuelle, libération des forces productives, libération des forces destructives, libération de la femme, de l'enfant, des pulsions inconscientes, libération de l'art. Assomption de tous les modèles de représentation, de tous les modèles d'anti-représentation. Ce fut une orgie totale, de réel, de rationnel, de sexuel, de critique et d'anti-critique, de croissance et de crise de croissance. Nous avons parcouru tous les chemins de la production et de la surproduction virtuelle d'objets, de signes, de messages, d'idéologies, de plaisirs. Aujourd'hui, tout est libéré, les jeux sont faits, et nous nous retrouvons collectivement devant la question cruciale : QUE FAIRE APRES L'ORGIE ?

Nous ne pouvons plus que simuler l'orgie et la libération, faire semblant d'aller dans le même sens en accélérant, mais en réalité nous accélérons dans le vide, parce que toutes les finalités de la libération sont déjà derrière nous et que ce par quoi nous sommes hantés, obsédés, c'est par cette anticipation de tous les résultats, par la disponibilité de tous les signes, de  toutes les formes, de tous les désirs. Que faire alors ? C'est ça l'état de simulation, celui où nous  ne pouvons que rejouer tous les scénarios parce qu'ils ont déjà eu lieu - réellement ou virtuellement. C'est celui de l'utopie réalisée, de toutes les utopies réalisées, où il faut paradoxalement continuer de vivre comme si elles ne l'étaient pas. Mais puisqu'elles le sont, et puisque nous ne pouvons plus garder l'espoir de les réaliser, il ne nous reste qu'à les hyper-réaliser dans une simulation indéfinie. Nous vivons dans la reproduction indéfinie d'idéaux, de fantasmes, d'images, de rêves qui sont désormais derrière nous, et qu'il nous faut cependant reproduire dans une sorte d'indifférence fatale.

Au fond partout la révolution a bien eu lieu, mais pas du tout comme on l'attendait. Partout ce qui a été libéré l'a été pour passer à la circulation pure, pour passer sur orbite. Avec quelque recul, on peut dire que l'aboutissement inéluctable de toute libération est de fomenter et d'alimenter les réseaux. Les choses libérées sont vouées à la commutation incessante, et donc à l'indétermination grandissante et au principe d'incertitude.

Rien (ni même Dieu) ne disparaît plus par la fin ou la mort, mais la prolifération, contamination, saturation et transparence, exténuation et extermination, par épidémie de simulation, transfert dans l'existence seconde de la simulation. Plus de mode fatal de disparition, mais un mode fractal de dispersion.

 

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Signe astrologique du sagittaire, Yves Bady

 

Rien ne se réfléchit plus vraiment, ni en miroir, ni en abyme (qui n'est encore que le dédoublement à l'infini de la conscience). La logique de la dispersion virale des réseaux n'est plus celle de la valeur, ni donc de l'équivalence. Il n'y a plus de révolution, mais une circonvolution, une involution de la valeur. A la fois une compulsion centripète, et une excentricité de tous les systèmes, une métastase interne, une autovirulence fiévreuse qui les porte à exploser au-delà de leurs propres limites, à outrepasser leur propre logique, non dans la tautologie pure, mais dans une montée en puissance, dans une potentialisation fantastique où ils jouent leur propre perte.

[...] Après le stade naturel, le stade marchand, le stade structural, voici venu le stade fractal de la valeur. Au premier correspondait un référent naturel, et la valeur se développait en référence à un usage naturel du monde. Au second correspondait un équivalent général, et la valeur se développait en référence à une logique de la marchandise. Au troisième correspond un code, et la valeur s'y déploie en référence à un ensemble de modèles. Au quatrième stade, le stade fractal, ou encore le stade viral, ou encore le stade irradié de la valeur, il n'y a plus de référence du tout, la valeur irradie dans toutes les directions, dans tous les interstices, sans référence à quoi que ce soit, par pure contiguïté. A ce stade fractal, il n'y a plus d'équivalence, ni naturelle ni générale, il n'y a plus à proprement parler de loi de la valeur, il n'y a plus qu'une sorte d'épidémie de la valeur, de métastase générale de la valeur, de prolifération et de dispersion aléatoire. En toute rigueur, il ne faudrait plus parler de valeur, puisque cette sorte de démultiplication et de réaction de chaîne rend impossible toute évaluation. [...] Le bien n'est plus à la verticale du mal, rien ne se range plus en abscisses et en ordonnées. Chaque particule suit son propre mouvement, chaque valeur, ou fragment de valeur, brille un instant dans le ciel de la simulation, puis disparaît dans le vide, selon une ligne brisée qui ne rencontre qu'exceptionnellement celle des autres. C'est le schéma même du fractal, et c'est le schéma actuel de notre culture.

Quand les choses, les signes, les actions sont libérées de leur idée, de leur concept, de leur essence, de leur valeur, de leur référence, de leur origine et de leur fin, alors elles entrent dans une auto-reproduction à l'infini. Les choses continuent de fonctionner alors que l'idée en a depuis longtemps disparu. Elles continuent de fonctionner dans une indifférence totale à leur propre contenu. Et le paradoxe est qu'elles fonctionnent d'autant mieux.

Ainsi, l'idée de progrès a disparu, mais le progrès continue. L'idée de la richesse qui sous-tend la production a disparu, mais la production continue de plus belle. Elle accélère au contraire à mesure qu'elle devient indifférente à ses finalités d'origine. Du politique, on peut dire que l'idée en a disparu, mais que le jeu politique continue dans une indifférence secrète à son propre enjeu. [...] Toute chose qui perd son idée est comme l'homme qui a perdu son ombre - elle tombe dans un délire où elle se perd.

 

dali, signe astrologique, signe astral, vierge
Signe astrologique de la vierge, Yves Bady

 

[...] Alors s'estompe en quelque sorte dans tous les domaines de la grande aventure de la sexualité, des êtres sexués - au profit du stade antérieur (?) des êtres immortels et asexués, de reproduisant comme des protozoaires, par simple division du Même et déclinaison du code. Les être technologiques actuels, les machines, les clones, les prothèses, tendent tous vers ce type de reproduction et tout doucement ils induisent le même processus chez les êtres dits humains et sexués. [...]

La possibilité de la métaphore s'évanouit dans tous les domaines. [...] Et notre mélancolie vient peut-être de là, car la métaphore était belle encore, esthétique, elle jouait de la différence et de l'illusion de la différence. [...]

 

la transparence du mal, jean baudrillardSe procurer l'ouvrage :

La Transparence du Mal

Jean Baudrillard

1990

Galilée

179 pages

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