lundi, 21 octobre 2013
Gorky Park - Michael Apted, William Hurt, Lee Marvin
Film : Gorky Park (1983, durée 2h06)
Réalisateur : Michael Apted
D'après le roman de Martin Cruz Smith.
Arkady Renko (William Hurt), Jack Osborne (Lee Marvin), Irina Asanova (Joanna Pacula), William Kirwill (Brian Dennehy), Iamskoy (Ian Bannen), le professeur Andreev (Ian McDiarmid), Anton (Richard Griffiths), Pasha (Michael Elphick), l'agent du KGB Rurik (Nial O'Brien), Levin (Henry Woolf), Natasha (Tusse Silberg), Fet (Patrick Field)
- Mon cher, vous avez la même insolence que votre père. Mais lui, on la lui passait parce qu'il avait beaucoup de talent dans son métier.
Irina : En quel honneur ai-je la visite d'un inspecteur principal ?
Arkady : Vos patins à glace ont été retrouvés, votre nom était dessus.
Irina : Oh, c'est vrai. Oh là là, depuis le temps.
Arkady : Votre déclaration de perte remonte au 4 février mais il paraît que vous les avez perdus le 31 janvier. Vous ne vous en êtes aperçue qu'au bout de quatre jours ?
Irina : Ce genre de choses, c'est quand on en a besoin qu'on voit qu'on les a égarées.
Arkady : C'est une fille morte qui les avait aux pieds.
Irina : C'est le bon Dieu qui l'a punie. Il faut me comprendre, vous savez, j'avais économisé sou par sou pour me les acheter. Et regardez mes bottes, vous voyez ? Foutues.
Arkady : La jeune personne qui avait vos patins a été assassinée.
Irina : Le réalisateur de mon film m'en a promis une paire si je voulais bien coucher avec lui. Faudrait que j'y pense. Qu'est-ce que vous en dites ?
Arkady : Que l'hiver touche presque à sa fin.
Irina : Très juste. Et puis je suis sibérienne, le froid, je connais.
Arkady : Fait-il aussi froid dans votre cœur ?
Irina : Quoi ?
Arkady : La jeune fille qui a été assassinée avait votre âge. Deux autres personnes ont été tuées en même temps. On leur a arraché le visage.
Irina : Pourquoi vous me dites ça à moi ? Qu'est-ce que vous voulez ?
Arkady : Vos patins à glace, vous ne savez pas qui les avait ?
Irina : Je soupçonne tout le monde et personne.
Arkady : Moi aussi.
Irina : Sincèrement, comptez-vous m'arrêter pour perte de patins à glace ?
Arkady : Je ne pense pas, non.
Irina : Tant mieux, alors laissez-moi tranquille maintenant.
Anton : Bravo, un week-end chez les Yamskoy. Est-ce un père héro de l'armée soviétique qui te vaut cette marque de faveur ? Non. Et tu conviendras que ce n'est sûrement pas non plus ton charme ni ton élégance.
Arkady : Oh, je ne resterai pas tout le week-end. Aujourd'hui seulement, le temps de coincer mon hôte dans un coin.
Anton : Alors, qu'est-ce que tu fabriques ?
Arkady : Je sauve la vie d'un homme.
Anton : La vie de qui ?
Arkady : La mienne. On m'a collé une affaire qui sent bon le KGB. Il va falloir que j'y aille sur la point des pieds.
- Je peux vous offrir un verre de bonne vodka soviétique ?
Arkady : Non, un verre de mauvais vin français fera l'affaire.
Iamskoy : J'ai lu votre rapport, Arkady. Je vous sens très désireux de repasser au KGB une affaire un peu délicate. Cela ne vous ressemble pas, hein, pourquoi, qu'est-ce vous chiffonne ?
Arkady : Puis-je m'ouvrir à vous ?
Iamskoy : A moi ?
Arkady : Il est plus que probable que le KGB a liquidé les trois victimes.
Iamskoy : Et alors ?
Arkady : Et alors, je suis certain que c'est moi que le KGB veut piéger.
Iamskoy : Pourquoi ?
Arkady : Il y a deux ans, j'ai voulu arrêter le major Preguda pour homicide volontaire. Vous vous rappelez, l'affaire des cadavres sur la berge ?
Iamskoy : Dieu qu'il fait froid ici. Vous voulez me glacer le sang jusqu'à la moëlle ?
Arkady : J'ai prouvé que c'était le fait du KGB. Après, j'ai demandé l'inculpation, mais c'est moi qu'on a arrêté, tabassé et jeté en cellule.
Iamskoy : Et qui vous a sorti de là ?
Arkady : Je vous en serai éternellement reconnaissant, mais quel sale moment à passer.
Iamskoy : Arkady, la roue tourne, vous savez. Désormais j'ai le bras plus long que je ne l'avais jadis. Et eux sont plus vulnérables. Vous êtes de loin le meilleur policier de Moscou. C'est de vous dont j'ai besoin, grand besoin.
Arkady : Pouvez-vous nous protéger, moi et mes miliciens ?
Iamskoy : Ecoutez, notre constitution soviétique est une bien belle chose, mais uniquement entre les mains de gens d'honneur. J'entends absolument rester dans la légalité. Le KGB ne peut et surtout ne doit pas travailler dans l'illégalité, sinon il ne vaut pas plus cher que la CIA !
Arkady : Que voulez-vous ?
Iamskoy : L'appui de la milice ! Ne vous désaisissez pas de l'enquête, il ne faut pas lâcher d'un pouce, et je vous promets, Arkady, à vous, personnellement, de vous épauler à chaque jalon posé par tous les moyens.
Arkady : Ce n'est pas le genre de maison où traînent les filles qui n'ont pas des bottes convenables, qu'est-ce que vous en dites ? Votre richissime ami américain ne va-t-il pas se fâcher ?
Irina : Je vous ai demandé de me ramener, pas de me faire la conversation.
Arkady : C'est parce que vous avez perdu vos patins que vous êtes sur les nerfs ? Enfin, perdus, c'est un mot.
Irina : J'ai fait ma déclaration à la police.
Arkady : Oui mais pourquoi ?
Irina : Quoi ?
Arkady : Je vous vois assez mal aller à la police pour ça si vous n'avez pas une autre bonne raison. Vous aviez peur que ces patins se trompent d'adresse ?
Irina : Laissez-moi sortir.
Arkady : Quoi ?
Irina : Stoppez et laissez-moi sortir, j'irai à pied.
Arkady : Faites pas l'idiote, il fait glacial, vous mourrez de froid. Mais qu'est-ce que vous faites !? Vous êtes folle, vous allez tout droit à la mort !
Irina : Des question, des questions.
Arkady : Et merde, saleté de voiture ! On sera deux maintenant à être frigorifiés. Démarre ! ...
Irina : Le KGB a de meilleures voitures.
Arkady : Oui mais il ne vous emmènent pas toujours où vous voulez, n'est-ce pas ?
¤ ¤ ¤
Anton : Qui t'a fait ça ? Qu'est-ce qui s'est passé ? C'est Primeluda ? Arkady !
Arkady : Mmmmh.... Ca avait l'air d'être un Américain.
Anton : Merde, la CIA, tu crois ?
Arkady : Je ne sais pas mais ses poings étaient de vraies massues.
Anton : Encore une petite goutte de tranquilisant ?
Arkady : Mmmmh...
Anton : Qu'est-ce qu'on fait dans cette cuisine ? Tu devrais être couché !
Arkady : C'est à la cuisine que tu planques ton armagnac.
Le professeur Andreev : Pour pouvoir faire ça, il faut imaginer que ce sont des êtres chers, ces petites créatures. Hé oui, nous en avons besoin. D'ailleurs, les êtres chers ne sous rongent-ils pas toujours les chairs, hein ?
Le professeur Andreev : Vous savez que trop de gens disparaissent dans ce pays sans laisser de trace. Et pourquoi, à votre avis ?
Arkady : Parce qu'ils tombent dans l'abîme entre ce qui se dit et le silence.
William Kirwill : Au cas où vous ne le savez pas, je vous signale qu'il pleut dehors.
Arkady : Fermez la porte. Non, jetez-la à mes pieds. Videz vos poches sur le lit. Enlevez le manteau aussi. Jetez-le par-terre. Les poches du pantalon.
William Kirwill : Alors, on est tout seul, le ruskov ?
Arkady : Pas un geste.
William Kirwill : Quoi ?
Arkady : Ne bougez pas !
William Kirwill : Allons, le ruskov, allons, je suis dans ma chambre. Où voulez-vous que j'aille ?
Arkady : Assis !
William Kirwill : Doucement.
Arkady : Attachez vous deux lacets de chaussures.
Arkady : J'ai passé une nuit blanche.
- Comment-comment-comment, il ne faut pas travailler autant !
Arkady : Rassurez-vous, camarade, je rentre chez moi avec mon petit déjeuner.
- Le poète doit ranger sa plume, le tueur sa cognée, et vous apprendre à vous relaxer.
Arkady : Eh bien, je vais pouvoir me relaxer dans mon lit.
- Venez plutôt avec moi. J'ai ce qu'il vous faut pour ouvrir les pores de la peau et délasser un esprit acablé de soucis.
Arkady : J'ai toujours rêvé de voir de près un Américain. Vous êtes tellement... tellement autre. Excusez l'insistance de mon regard. Jusqu'à présent, je n'avais vu qu'un seul Américain, en chair et en os si je puis dire. Un jeune étudiant, il s'appelait Kervin, je crois, James Kervin.
Jack Osborne : Ah.
Arkady : Mais à la morgue, hélas.
Jack Osborne : Alors vous vous êtes senti floué.
Arkady : Comme vous avez dû le remarquer, un monde sépare un homme comme vous, monsieur Osborne, d'un homme comme moi.
Jack Osborne : Vous avez une moustache.
Arkady : ... Pardon ?
Jack Osborne : Vous avez une miette sur la lèvre supérieure.
Arkady : ... Quel plouc, n'est-ce pas ? Ce petit inspecteur venu de rien, il n'a pas sa place dans votre monde. Rendez-vous compte, trois personnes, tuées et sauvagement défigurées, dans Gorky Park, et moi, j'ai des miettes sur ma lèvres.
Jack Osborne : Si encore c'était du caviar.
Arkady : J'ai l'impression que l'exécuteur, appelons-le X pour le moment, aurait préféré que l'adversaire toi un homme un peu plus subtile, non ?
Arkady : C'est vous qui importez nos merveilleuses zibelines soviétiques en Amérique, monsieur Osborne ?
Jack Osborne : Oui, je les achète. N'est-ce pas votre monopole, les zibelines ?
Arkady : J'ai toujours eu envie d'une chapka en zibeline.
Jack Osborne : Un homme de votre envergure devrait avoir ça. Je peux y pourvoir peut-être ?
Arkady : Oh, nous autres Russes, nous sommes dressés à attendre pour obtenir, d'où ma patience, n'est-ce pas. J'observe, je réfléchis et je patiente. C'est ma seule vertu.
Jack Osborne : Pourquoi attendre ? Je suis toujours prêt à obliger mes plus sympathiques amis soviétiques.
Arkady : La patience a sa propre récompense.
Jack Osborne : Vous le voulez ce cadeau ou non ? A moins que mon Sherlock Holmes ne songe à une récompense encore plus payante ?
Arkady : Oui,... c'est possible.
Jack Osborne : Vous n'avez pas encore décidé.
Arkady : Mmmmh, pas pour l'instant. Je marche d'abord à l'intuition, ensuite je réunis mes observations, et enfin je...
Jack Osborne : ... vous ...
Arkady : ... je pars en chasse.
Jack Osborne : Oh, on ne chasse pas ainsi la zibeline. Elle est bien trop rusée, elle est bien trop vive. Le temps que vous patientez, réfléchissiez et observiez, votre proie sera loin.
Arkady : Non, je ne le pense pas.
Jack Osborne : Pourtant moi, la chapka, je l'ai, et vous pas.
07:04 Publié dans Films étrangers, Les mots des films | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gorky, park, william, hurt, lee, marvin, michael, apted
mercredi, 25 juillet 2012
Le choix de Jane - Jane Austen
Téléfilm : Le choix de Jane / Miss Austen regrets (2008, durée 1h30)
Réalisateur : Jeremy Lovering
Musique : Jennie Muskett
Jane Austen (Olivia Williams), Cassandra Austen sa soeur (Greta Scacchi), madame Austen sa mère (Phyllida Law), Fanny Austen-Knight sa nièce (Imogen Poots), Henry Austen son frère (Adrian Edmondson), Edward Austen-Knight un autre de ses frères (Pip Torrens)
John Plumptre le prétendant de Fanny (Tom Hiddleston), le révérend Brook Bridges (Hugh Bonneville), le révérend Clarke et bibliothécaire du roi (Jason Watkins), le révérend Charles Papillon (Harry Gostelow), le docteur Charles Haden (Jack Huston), madame Bigeon (Sylvie Herbert), Anna Lefroy (Sally Tatum), Stephen Lushington (Tom Goodman-Hill)
Jane : Dites-moi que j'ai fait le bon choix. Dites-moi que j'ai eu raison de changer d'avis. Seigneur, faites que je ne regrette jamais ce jour.
Lettre de Jane à Fanny : Ma très chère Fanny, ta dernière lettre m'intrigue au plus haut point. Tu me fais une telle description de ton étrange petit cœur. Ce nouveau jeune homme que tu adores, est-il l'homme de ta vie ? Si seulement nous pouvions prévoir l'avenir et savoir par avance si nous avons fait le bon choix. Hélas, tu dois prendre la décision la plus importante de ta vie en ayant pour seul conseil que celui de ta tante Jane. En venant au mariage de ta cousine, prépare-toi à discuter avec moi de chaque délicieux détail.
Le prêtre au mariage : Seigneur, considérez ces nouveaux époux avec bonté. Que cette femme soit aimante, qu'elle soit aimable, fidèle et obéissante envers son mari. Seigneur, accordez-leur votre bénédiction.
Fanny : Aide-moi à me décider, j'en suis incapable.
Jane : Je dois absolument rencontrer ton cher monsieur Plumtre dans les meilleurs délais. C'est très urgent. Plumtre, Plumtre, madame Plumtre !
Fanny : Chh-chht ! Je t'en prie, arrête, tout le monde va entendre !
Jane : Avec un nom aussi grotesque, je suppose que tu vas le trouver irrésistible. [...] Ne t'imagine pas que tu arriveras avant moi devant l'autel. On doit me faire une demande en mariage d'un jour à l'autre.
Fanny : Quelle mauvaise plaisanterie !
Jane : Ecoute-moi bien, Fanny. Tout homme n'attend qu'une chose, une opportunité.
Jane : Monsieur Papillon.
Le révérend Papillon : Oh ! Miss Austen.
Jane : Charmant office.
Le révérend Papillon : Vous êtes trop bonne, miss Austen. Mes efforts ne peuvent rivaliser avec votre... intelligence supérieure.
Jane : Comme cela est romantique.
Le révérend Papillon : Romantique ? Mon Dieu, non.
Jane : Tout le monde devrait pouvoir se marier. Vous n'êtes pas d'accord ?
Le révérend Papillon : ... Saint Paul lui-même nous dit qu'il vaut mieux se marier que se consumer de désir.
Jane : Hoh, comment résister... Je suis convaincue, monsieur Papillon, qu'il n'est pas une seule de nos dames de la société anglaise, même la plus endurcie des vieilles filles, qui échouerait à trouver le bonheur si seulement ces messieurs voulaient bien... saisir l'opportunité. Toute opportunité !
Le révérend Papillon : Vous avez certainement raison.
¤ ¤ ¤
Cassandra : Tu ne devrais pas torturer ce pauvre homme. On dirait une chatte avec un mulot, c'est cruel.
Jane : Monsieur Papillon est aussi sec qu'un hareng saur. Je parie qu'il n'a rien remarqué. Je suis moi aussi fille de pasteur. Pourquoi ne ferais-je pas une charmante femme de pasteur ?
Cassandra : Tu donnes le mauvais exemple à ta propre nièce.
Jane : Cette petite est délicieuse. Et quand je pense qu'elle va épouser un quelconque gentleman habitant le Kent.
Cassandra : Quelqu'un qui vit dans le Kent est forcément aimable.
Jane : Je n'aime pas que les gens soient trop aimables. Sinon je me sens obligée de les aimer.
Cassandra : Tu crois que tu auras du temps pour écrire dans le Kent ?
Jane : Je prendrai le temps. Aide-moi, Cassandra, je vais être en retard !
Cassandra : Ecris-moi tous les jours.
La mère : Tu te rends compte du nombre de connaissances qu'elle va faire ?
Cassandra : Mère...
La mère : Toi, toi tu as décidé de t'entourer de murs il y a des années. Mais Jane, ne me dis pas que les hommes ne l'intéressent pas.
Cassandra : Elle connaît tous les hommes du Kent.
La mère : Ah, mes pauvres filles.
Fanny : Qu'est-ce qui est pire à ton avis ? Faire un mauvais mariage ou mourir seule comme une vieille fille ?
Jane : Il y a pire que mourir.
Fanny : Tu n'es pas vieille.
Jane : J'aurai bientôt quarante ans. Assez vieille pour pouvoir m'en vanter.
Fanny : Nous devons donc chercher un vieux veuf fortuné avec six enfants !
Jane : Charmante perspective.
Fanny : Tu devais avoir des centaines de demandes quand tu avais mon âge.
Jane : Des milliers.
Fanny : Je parie que tous les jeunes hommes de ton voisinage se mouraient d'amour pour toi.
Jane : Hélas... pas pour moi.
Fanny : Des demandes en mariage ?
Jane : Non, aucune, ma chère. Crois-moi, je suis bonne que pour la théorie et rien de plus. Et malgré ma honte de vieillir, je suis heureuse qu'il en soit ainsi. C'est moins compliqué.
Fanny : Tu n'as donc jamais été amoureuse ?
Jane : ... La vérité, Fanny, et je te demande de garder le secret, de ne jamais le dire à qui que ce soit, la vérité, c'est que... c'est moi qui ai été amoureuse et quittée.
Fanny : Qui était-ce ? Dis-moi.
Jane : J'ai aimé sans retour. J'ai brûlé. J'ai languis. Et ensuite, je me suis juré de faire de la solitude et de l'écriture une espèce de consolation.
Fanny : Non, c'est vrai ?
Jane : Tu lis beaucoup trop de romans, chère Fanny.
¤ ¤ ¤
Fanny : Oh, je serais désespérée si tu n'apprécies pas monsieur Plumtree.
Jane : Mais voyons, je suis déjà en adoration devant lui.
Fanny : Ne t'attends surtout pas à un monsieur Darcy.
Jane : Ma chérie, je crois que tu confonds fiction et vie réelle. La seule façon de rencontrer un monsieur Darcy est de l'inventer de toutes pièces, comme moi.
John Plumptre : Je rêve du jour où chacun d'entre nous sur cette terre sera assez adulte et assez fort pour se détourner des joies futiles de ce monde et pour ne penser qu'aux jours infinis que nous réserve notre Seigneur dans les cieux.
Jane : Certes, mais en attendant, voulez-vous...
John Plumptre : En attendant, un écrivain comme vous, miss Austen, possède une telle influence qu'il peut encourager les gens à devenir vertueux. Et c'est pourquoi, mais je vous demande de ne pas le prendre en mauvaise part, c'est pourquoi cela me chagrine de voir que la plupart de vos hommes d'église sont des sujets de moquerie.
Jane : Ma mère... ma mère aime mes pasteurs, c'est ridicule.
John Plumptre : Mais votre père est...
Jane : Pasteur, oui. Un pasteur, bien réel. Tandis que mes pasteurs sont... de pures fictions, est-ce clair ? Ce ne sont que des histoires.
¤ ¤ ¤
Jane : Il est beau, n'est-ce pas ? Et sa foi est un bon point en sa faveur. Il a des manières de gentleman qui me plaisent. Plus raisonnable que brillant. Mais personne n'est brillant de nos jours.
Edward : Est-il recommandable ?
Jane : Grand Dieu, comment pourrais-je le savoir ?
Edward : Bien sûr. Néanmoins...
Jane : Les jeunes filles de vingt ans veulent tellement tomber amoureuse. Il est si difficile de savoir si c'est vraiment de l'amour. Chacun de nous devrait avoir la chance de faire au moins une fois un mariage d'amour, si c'est possible.
Lettre de Jane à Cassandra : Me voici enfin seule, quel bonheur. A l'heure présente, je dispose de cinq tables, de vingt-huit chaises et de deux cheminées pour moi toute seule. Je suis pour ainsi dire seul maître à bord.
Jane : Etes-vous heureux à Ramsgate, monsieur Bridges ?
Le révérend Bridges : Oui ! Et vous dans le Hampshire, miss Austen ?
Jane : Oui !
Le révérend Bridges : J'ai été surpris d'apprendre que vous aviez quitté Bath.
Jane : Il y a une affreuse prolifération de femmes laides à Bath. Et d'hommes aussi d'ailleurs. Je n'ai pas écrit le moindre mot valable ou utile durant dix ans. Ensuite nous sommes allés dans le cottage du Hampshire, et j'ai su que c'était pour la vie. Je savais que ma mère se plairait là-bas, et que ma sœur s'y sentirait plutôt bien.
Le révérend Bridges : Vous avez oublié quelqu'un.
Jane : ... Et que je pourrai écrire. Tout finit toujours par s'arranger, n'est-ce pas ?
Le révérend Bridges : C'est possible.
Stephen Lushington : Fanny, ma chère, une vraie jeune fille !
Fanny : Monsieur Lushington.
Edward : Ma soeur, miss Austen. Jane, je te présente monsieur Stephen Lushington, représentant de Kanterburry au parlement.
Stephen Lushington : Je me réjouis de voir que vous êtes aussi charmante en personne qu'au travers de vos écrits, miss Austen.
Jane : Oh, je-je n'ai encore rien dit, il me semble.
Stephen Lushington : Certains hauts personnages du palais de Westminster font la queue pour avoir la chance de vous voir.
Jane : Ah, vont-ils m'observer ainsi qu'un animal sauvage dans un zoo ?
Stephen Lushington : Un animal sauvage, pris dans mes rets ici dans cette bibliothèque, votre domaine, où vous êtes entourée, épaulée par la sagesse des anciens. Avec crainte, je foule les sentiers silencieux cousus d'or. Oh, nature, demeure éternelle des morts.
Jane : Vous aimez George Crane.
Stephen Lushington : J'ai toujours un exemplaire de ses poèmes dans ma poche, quand la chambre des communes devient trop ennuyeuse.
Jane : Ses œuvres complètes tiennent donc dans votre poche.
Stephen Lushington : Orgueils et Préjugés tiennent dans l'autre. Mansfield Park est sous mon chapeau ! Et Raisons et Sentiments est coincé sous mon bras.
Jane : Oh... Et où allez-vous mettre mon Emma ?
Stephen Lushington : Une nouvelle héroïne ! Ma chère miss Austen, permettez-moi de monopoliser votre attention sans vergogne, jusqu'à la fin du dîner, et même au-delà.
Fanny : Tu as laissé cet horrible politicien flirter avec toi toute la soirée.
Jane : Je suis un peu amoureuse de lui. Il est brillant. Et il a bon goût.
Fanny : Ambitieux et hypocrite.
Jane : C'est une bonne chose. Ca m'empêche de jeter mon dévolu sur un homme qui possède déjà une femme et dix enfants !
Fanny : En outre, il est laid.
Jane : Bien joué, Fanny. Tu as enfin découvert la véritable raison pour laquelle je n'ai jamais choisi de mari.
Fanny : Parce que tu n'en as jamais trouvé un qui soit assez beau.
Jane : Pas du tout ! Je n'en ai jamais trouvé un qui vaille la peine qu'on dépasse le flirt.
¤ ¤ ¤
Lettre de Jane à Cassandra : Ma chère Cassandra, je pense que j'ai bu un peu trop de vin hier soir. Je ne sais comment expliquer autrement le tremblement de mes mains aujourd'hui. Au moins, ma coiffure n'en a pas souffert. Et pour l'instant, je n'ai pas d'autre ambition.
Edward : Ah, tu es là. Tout le monde est sorti, est allé prendre l'air.
Jane : Je sais. Je me suis levée très tard.
Edward : Je pensais te trouver assise dans un coin, en train de gribouiller.
Jane : Ce matin, je ne suis pas d'humeur à gribouiller.
Edward : Ca avance comme tu veux ?
Jane : Ca va. Emma est presque terminé. Mais monsieur Egerton refuse de publier une nouvelle édition de Mansfield Park. Alors je me disais qu'on pourrait peut-être faire appel à un nouvel éditeur pour publier Emma. Peut-être qu'on devrait demander un peu plus d'argent aussi.
Edward : Je te répète que tu ne dois pas espérer gagner de l'argent avec tes romans.
Jane : Raisons et Sentiments m'a rapporté plus de cent-quarante livres. Il me semble que je peux en être fière, non ?
Edward : Essaie d'imaginer l'image que cela donne de nous, tes frères. D'avoir une sœur de ton âge qui n'est pas mariée, et qui en outre cherche un emploi. Sache que je veillerai toujours sur toi, sur Cassandra et notre mère. Mais je suis veuf, j'ai onze enfants à élever, j'ai hérité d'une demeure que je n'a pas les moyens d'entretenir et d'un domaine avec un tas de complications.
Jane : Quelles complications ?
Edward : Huh... Ma succession est remise en cause. L'acte notarié a été mal rédigé, paraît-il. S'ils ont gain de cause, je perdrai la moitié de tout ce que je possède.
Jane : Cette maison aussi ?
Edward : Non-non-non-non, cette maison est à l'abri. Je crois que je me suis mal exprimé. En fait, l'assignation ne concerne que mes droits sur le domaine du Hampshire.
Jane : Le cottage...
Edward : Je ne veux pas que tu t'inquiètes. Il y aura toujours de la place ici pour vous tous.
Jane : Edward, le cottage est l'endroit où j'écris.
Edward : Ah, Jane, si seulement tu étais moins orgueilleuse. Si seulement tu t'étais mariée.
Jane : Vous avez toujours été enthousiaste, ce que toute femme attend d'un homme.
Le révérend Bridges : J'attendais la nouvelle de votre mariage.
Jane : Comme toute femme vous le dira, il y a une grande pénurie d'hommes en général et une encore plus grande d'hommes biens.
Le révérend Bridges : Vous vous dissimulez derrière de belles phrases, comme toujours, Jane.
Jane : Tant mieux ! Parce que mes belles phrases me permettront de mettre un toit sur ma tête. Ou celle de ma mère, ou de ma soeur. Je vais moi-même être obligée de jouer le rôle du mari. On en est là.
Le révérend Bridges : J'aurais mis un toit sur leur tête et vous, Jane, je vous aurais aimée jusqu'à ce que la mort nous sépare.
Jane : La publication est prévue pour quand ?
Henry : Il n'y a pas encore de date, en tout cas de date officielle.
Jane : Mais il y a un contrat ?
Henry : Le contrat... est en cours d'élaboration. Oh, Jane, il propose bien peu d'argent. Il veut tous tes romans contre quatre-cent cinquante livres.
Jane : Mais c'est une misère !
Henry : Je suis banquier, et s'il y a une chose que les banquiers connaissent bien, c'est l'argent. Tu sais que tu peux compter sur moi.
¤ ¤ ¤
Jane : Je suis folle d'imaginer que les lecteurs vont pouvoir aimer... une horrible petite snob qui va mettre son nez partout.
Henry : Emma ? Tout le monde va l'aimer.
Jane : Et si tout le monde jugeait que ce n'est pas aussi bien qu'Orgueils et Préjugés et que mes meilleurs livres appartiennent au passé ?
¤ ¤ ¤
Jane : Je suis étonnée d'apprendre que vous lisez des romans, monsieur Haden. Je doute d'être assez intelligente à vos yeux. Les hommes, en général, lisent de meilleurs livres.
Le docteur Haden : A vrai dire, j'ai lu plus de romans sentimentaux qu'il n'est bon pour mon âme immortelle.
Jane : Je crains que vous ne deviez retirer le mot "sentimental", si vous tenez à prouver que vous avez lu mes livres.
Le docteur Haden : J'ai été particulièrement intéressé de constater que lady Bennett se rend compte qu'elle aime monsieur Darcy lorsqu'elle voit sa magnifique demeure.
¤ ¤ ¤
Le docteur Haden : Il n'a besoin que de repos et de calme, c'est-à-dire de vous. Je lui ai pris un demi-litre de sang, mais je crains de devoir renouveler l'opération demain.
Jane : Oh, excellent ! ... Je veux dire, faites ce qu'il faut.
Le docteur Haden : Au revoir, miss Austen. Mesdames.
Jane : A demain alors.
Le docteur Haden : Avec grand plaisir.
Le docteur Haden : Votre frère ne vous l'a peut-être pas dit, miss Austen, mais mon chef de service a, parmi ses patients, des personnages très haut placés, plus haut que vous ne pouvez l'imaginer.
Jane : Mais mon imagination peut voler très haut.
Le docteur Haden : Eh bien, j'ai appris par hasard que le prince régent aimait vos romans.
Jane : Hhh, je déteste cet homme. Je prends toujours le parti de sa femme !
Le docteur Haden : Alors cachez vos sentiments autant que possible, je dois recevoir une invitation royale d'un jour à l'autre.
Jane : Nous allons rencontrer son altesse royale ?
Le docteur Haden : Non, pas nous. Vous, rien que vous. Je ne suis que le messager.
Jane : Oh, je vais décliner dans ce cas. Le prince régent est un être si désagréable que je me serais bien passé d'être appréciée par lui.
Le docteur Haden : Oh, donc vous ne souhaitez être lue que par les hommes que vous estimez ?
Jane : Pourquoi est-ce que je ne choisirais pas mes lecteurs tout comme je choisis mes amis ?
Le docteur Haden : Mais parce que ce n'est pas comme ça qu'on fait fortune.
Jane : Alors je serai à jamais pauvre, obscure et méconnue.
Le docteur Haden : Non, au contraire, je donnerais cher pour vous voir briller de tous vos feux parmi la meilleure compagnie.
¤ ¤ ¤
Jane : Nous sommes de bien étranges créatures. Aussitôt que nous sommes sures de l'attachement d'un homme, nous ne pensons qu'à nous en détacher. Pauvre monsieur Plumtre. Il faut lui rendre sa liberté. Quand tu es avec lui, montre-lui une telle froideur qu'il puisse se convaincre qu'il a pris ses rêves pour la réalité.
Fanny : Il ne va pas le supporter.
Jane : En effet, pendant quelques temps, il va beaucoup souffrir, je n'en doute pas. Mais je crois dur comme fer que ce genre de déception amoureuse n'a jamais tué personne. Et je suis maintenant à Londres, où les rues sont pavées d'une foule de jeunes gens impatients. Fanny, rien ne peut être comparé au malheur d'un mariage sans amour, au fait d'être lié pour la vie à quelqu'un et de préférer quelqu'un d'autre. C'est un châtiment que même toi tu ne mérites pas.
Fanny : Tes cheveux sont très joliment bouclés aujourd'hui.
Jane : Monsieur Haden, j'ignore ce que je dois faire, je n'ai aucune expérience.
Le docteur Haden : Vous avez quelque chose de beaucoup important et de beaucoup plus enviable que l'expérience.
Jane : Quoi donc ?
Le docteur Haden : De l'imagination. Songez à moi qui vous encourage, votre plus grand supporter croit en votre victoire.
Le bibliothécaire du roi : Miss Austen, l'honneur de votre visite est immense, incommensurable ! Sachez que le régent a lu et admiré tous vos romans, miss Austen. Son altesse royale en possède un exemplaire dans chacune de ses résidences, si-si. Et moi, son humble bibliothécaire, j'aime Stanley Clarke. Je les ai également lus. Deux fois. Voulez-vous des gâteaux ?
Jane : Volontiers.
Le bibliothécaire du roi : Je suis persuadé qu'Emma sera un grand succès.
Jane : J'ai quand même un peu peur que les lecteurs qui ont goûté Orgueils et Préjugés le trouvent trop sérieux et que ceux qui ont goûté Mansfield Park le trouvent au contraire trop frivole.
Le bibliothécaire du roi : Non, c'est impossible, madame, car chaque œuvre nouvelle montre que votre esprit a encore grandi en énergie et en puissance de discernement. Vos livres reflètent la très haute idée de votre génie, et de vos principes.
Jane : Ce sont mes très chers enfants. Je les envoie à travers le monde. Et ils se mesurent aux autres enfants, ceux de Walter Scott ou Lord Byron.
Le bibliothécaire du roi : Aucune comparaison, chère madame, ces... ces deux messieurs sont illisibles.
Jane : Voyez-vous, j'ai accompli jusqu'ici si peu de choses. Ma vie a été si ordinaire. Mon œuvre est encore si mince. Mes livres sont...
Le bibliothécaire du roi : Miss Austen...
Jane : Ce sont des miniatures en ivoire, de cinq centimètres de large, sur lesquels je travaille avec des pinceaux extrêmement délicats.
Le bibliothécaire du roi : Vous avez l'entière liberté de dédicacer Emma... à son altesse royale. L'entière liberté ! Hum... peut-être dans un de vos prochains ouvrages, euh... pourriez-vous décrire... la ville, les habitudes, le caractère et l'enthousiasme d'un clergyman. Le montrer par exemple en train d'enterrer sa mère, ce que j'ai fait et dont je ne me suis jamais remis. Ou... ou...
Jane : "Faites de votre clergyman un aumônier de la royale navy, un ami des grands officiers de marine !" "Monsieur Clarke, ai-je dit, je suis fort honorée, mais un personnage comme celui-là devrait aborder des sujets tels que la science, la philosophie et une femme telle que moi n'y connaît rien. Hélas, toute modestie mise à part, je crois bien que je me peux me vanter d'être la plus inculte de toutes les femmes qui ont jamais osé s'attribuer le titre de femme de lettres."
Le docteur Haden : Bravo !
Fanny : C'est très vilain, Jane. Tu n'as pas eu pitié de ce pauvre homme ?
Jane : Je n'ai jamais pitié de quelqu'un qui n'est pas de ma famille.
Henry : Une raison de plus pour me féliciter chaque jour d'être ton frère.
Jane : Comme le savent bien tous les éditeurs, la plupart des lecteurs aime surtout les histoires d'amour sérieuses. Hélas, si j'en écrivais une, ce ne serait que pour survivre. Je préfère laisser d'autres plumes ruminer sur la culpabilité et le malheur.
Henry : Un toast à Culpabilité et Malheur !
Le docteur Haden : Et donc, si nous voulons vraiment contribuer à votre fortune, miss Austen, nous devons vous aider à écrire le parfait roman moderne.
Jane : Le genre d'histoire où l'héroïne est forcément la fille d'un clergyman, la perfection incarnée, tendre, sentimentale, bonne, dénuée du moindre sens de l'humour, parlant plusieurs langues étrangères, bien sûr, et divinement douée pour la musique, cela va de soi.
Le docteur Haden : Et notre héroïne jouera de quel instrument ?
Jane : Du pianoforte, ce qui permettra de mettre en valeur ses bras splendides.
Le docteur Haden : Et quel jeune homme sera digne d'une telle perfection ?
Jane : Un héro aussi parfaitement mortel que mortellement parfait. Je vous laisserai le soin d'écrire ces chapitres, monsieur Haden. La peinture de la perfection me rend malade et mauvaise.
Le docteur Haden : C'est vrai, la méchanceté a beaucoup plus de charme.
Jane : Totalement dénué de scrupules et de grandeur d'âme, désespérément amoureux de l'héroïne, il la poursuit de son inexorable passion. Notre héroïne est désespérément belle, et son vieux père est un cas désespéré.
Henry : Oh mon Dieu, ne dites rien à mon frère.
Le docteur Haden : Dans tous les lieux où passe notre héroïne, partout les gens tombent amoureux d'elle, et elle reçoit de nombreuses demandes en mariage.
Jane : Ensuite, après avoir réussi environ une vingtaine de fois à échapper de justesse aux bras de notre héro et après des torrents de larmes, au dernier moment...
Le docteur Haden : Elle épouse celui auquel elle était destinée depuis toujours. Au fait, est-ce que vous y croyez, miss Austen, qu'on finit toujours par trouver la compagne ou le compagnon idéal ?
Jane : J'y crois... quand j'écris un roman.
Fanny : Comme tout ça est peu romantique.
Le docteur Haden : Oh mais les héroïnes de votre tante sont toutes très sages. Chacune épouse un homme fortuné, et chacune se marie par amour.
Madame Bigeon : Et vous, monsieur Haden, quelle est votre idée de la parfaite femme ?
Le docteur Haden : Hum, force spirituelle et douceur des manières.
Henry : Hmm, bien, Haden ! On ne saurait mieux.
Jane : Vous l'aurez votre douce femme, pleine de gratitude et de dévotion. Je vous souhaite qu'elle soit silencieuse, tranquille et un peu ignorante. Friande de thé vert et de pain de veau en croûte chaque après-midi. Tu as l'air fatigué, Henry. Allez viens, montons.
Henry : Pas question. Je me sens très bien et je m'amuse beaucoup.
Jane : Vous étiez chacun sur une chaise ou tous les deux sur la même ?
Fanny : Tu es jalouse.
Jane : Je suis ta tante.
Fanny : Et une femme.
Jane : Et un tigre quand je vois une proie.
Madame Bigeon : La passion est faite pour la jeunesse. Elle s'évanouit si vite...
Jane : Pas dans nos rêves.
Madame Bigeon : Le bien-être demeure, ainsi que demeure l'amitié, si vous avez autant de chance que j'en ai eu.
Jane : Le bonheur dans le mariage est uniquement une question de chance.
Madame Bigeon : Mais voyez comme nous paniquons au moment de choisir. Et pourtant l'amour meurt et la fortune se dissipe. Toute femme, qu'elle soit célibataire ou femme mariée, je vous le dis, toute femme a des regrets. Alors quand nous lisons l'histoire de vos héroïnes, nous nous sentons jeunes et encore amoureuses et pleines d'espoir, comme si nous pouvions à nouveau choisir notre vie.
Jane : Et faire le bon choix.
Madame Bigeon : C'est un don que vous avez. Un vrai, un don du ciel. Et un don suffisant, je crois.
Henry : En résumé, oui, j'ai trop prêté et j'ai également trop emprunté. Ne me regarde pas comme ça. Oui, ma banque a fait faillite, ce qui signifie que j'ai tout perdu. Je suis ruiné.
Jane : Edward ne peut pas t'aider. Edward a lui-même un procès, il a assez de problèmes de son côté.
Henry : Edward a garanti mes emprunts à hauteur de vingt mille livres. Je crains fort qu'il ne revoit jamais cet argent.
Jane : Oh, Henry... Oh, Seigneur.
Henry : Et maintenant je vais entraîner toute la famille avec moi.
Jane : Mère...
Henry : Pas un seul mot. Je lui dirai moi-même. Je lui parlerai demain.
Jane : Je ne veux rien du tout. Je veux seulement gagner plus d'argent. Je veux que toi et notre mère viviez à l'aise, sans avoir constamment peur que nos frères soient dépossédés de la maison, et de tout ce que nous avons. Je voudrais être débarrassée de cette affreuse fatigue, Cassandra.
Cassandra : Veux-tu qu'on aille au bord de la mer.
Jane : Au bord de la mer, on a bon appétit en général. Au bord de la mer, on n'est pas sinistre en général. On n'est pas lasse et fatiguée au point de s'écrouler de lassitude.
Cassandra : Je t'en prie, dis-moi pour quelle raison tu m'en veux ?
Jane : Mais pourquoi je t'en voudrais ? Je m'en veux à moi-même. Je n'ai guère le droit d'être malade. J'ai un roman à terminer, et tellement de personnages dans ma tête, tellement d'histoires, et si peu de temps.
Madame Austen : Entre autres choses, on découvre que plus on aime l'homme qu'on a épousé, plus on aime ses enfants.
Jane : C'est un luxe dangereux et coûteux que de tomber malade à mon âge.
Le révérend Bridges : Lors de notre rencontre dans le Kent, je vous ai parlé de façon irréfléchie.
Jane : Vous n'allez pas avoir l'inconvenance de revenir sur ce que vous avez dit.
Le révérend Bridges : Sachez que je ne vous aurais jamais empêché d'écrire, si c'était là votre crainte.
Jane : Si j'avais été votre femme, comment aurais-je pu écrire ? Tous ces devoirs de maternage... Nous aurions été pauvres.
Le révérend Bridges : Vous êtes pauvre de toute façon... Nous aurions pu rire ensemble au moins.
Jane : C'est ça, le mariage, non ?
Le révérend Bridges : Je suppose qu'aucun homme en chair et en os ne sera jamais digne de la créatrice de monsieur Darcy...
Jane : Vous vous trompez sur lui. Il ne m'aurait pas convenu.
Le révérend Bridges : Si j'avais pris mon courage à deux mains après notre danse à ce bal,...
Jane : Non, nous étions trop jeunes.
Le révérend Bridges : Et plus tard, quand je vous ai demandée ?
Jane : J'ai simplement évacué toute idée de mariage de ma tête...
Le révérend Bridges : Dites-moi que vous le regrettez. Dites-moi qu'il vous arrive parfois la nuit de penser à moi. Dites-le moi même si c'est faux.
Jane : Pourquoi ? A quoi bon maintenant ?
¤ ¤ ¤
Henry : J'en ai assez de la banque, Jane. Je veux devenir pasteur.
Madame Austen : Mes fils ont toujours fait de leur mieux pour aider cette famille, mais elle, elle n'est qu'une égoïste, une égoïste ! Je t'ai vue avec monsieur Bridges, en train de flirter comme une petite sotte ! C'est un homme marié. Si tu voulais vraiment être madame Bridges, la femme du pasteur, il fallait dire oui, quand il te l'a demandé.
Jane : Facile à dire. Mais je ne le voulais pas.
Madame Austen : Et après, tu as eu encore le choix d'un meilleur parti, un homme riche, sa belle demeure. Mais non, là encore, tu l'as rejeté. Tu l'as jeté comme tu as jeté ta vie en l'air, et la mienne et celle de tes sœurs en même temps ! Parce que lui n'était pas assez bon pour la sainte miss Jane et son imagination littéraire ! Non, elle est beaucoup mieux que monsieur Harris Bigg avec son beau manoir et ses cinq cent hectares.
Jane : Oh, mère, ça remonte à des années.
Madame Austen : Oui, quinze ans exactement. C'est gravé dans mon cœur ! Ca fait quinze ans qu'un soir, toi, tu l'as laissé fuir comme une enfant beaucoup trop gâtée ! Fuire le mariage et la sécurité.
Jane : Je ne pouvais pas épouser quelqu'un que je n'aimais pas.
Madame Austen : Alors pourquoi est-ce que tu lui as dit oui !? "Oui, Harris, je serai madame Bigg."
Jane : J'ai fait une erreur.
Madame Austen : Ton erreur a été, le lendemain matin, de revenir sur ton engagement.
Jane : Tu voulais que je fasse quoi ? Que je me vende pour de l'argent !?
Madame Austen : Nous aurions eu de la fortune, grâce à ça. Et tu sais ce que ça veut dire ? La fortune est juste un autre mot pour désigner la sécurité.
Cassandra : Mère, je vous en prie !
Madame Austen : Toi, arrête de la défendre, tu l'as assez fait ! Tu as sacrifié notre sécurité sur l'autel de tes principes, Jane. Est-ce que ça t'a rendue heureuse, oui ou non ? Regarde-toi, tu es malade. Personne ne me dit rien, mais j'ai des yeux derrière la tête. Oui, ma pauvre petite fille seule.
Fanny : Tante Jane !
Jane : Pas maintenant, Fanny.
Fanny : Tu as dit oui parce qu'il était riche et non pas parce que tu l'aimais. C'est si romanesque.
Jane : Est-ce que tu choisirais ma vie ? Tu as peut-être le droit de m'en vouloir, mais ne t'avise surtout pas de me plaindre !
Jane : Aucun de ces hommes ne m'a comblée de bonheur. Comblée de bonheur, ça ne suffit pas. Comblée de bonheur, ce n'est pas ainsi que je veux écrire la fin de mon histoire. Etre aussi pauvre est déjà presque insupportable. Le seul regret que j'ai de ne pas avoir épousé Harris Bigg, c'est que je vais mourir en ne vous laissant rien à notre mère et à toi.
Cassandra : Non, arrête. Arrête, arrête, Jane. C'est ma faute. Si j'avais gardé le silence, si je n'avais pas voulu te convaincre, tout au long de cette nuit, je t'ai harcelé jusqu'à te faire changer d'avis. C'est à cause de moi que tu l'as repoussé.
Jane : Tu m'as montré quel était le véritable enjeu de mon choix.
Cassandra : A cause de moi, tu as choisi la solitude et la pauvreté.
Jane : A cause de toi, j'ai choisi la liberté.
Cassandra : Je ne l'ai pas fait pour toi, Jane.
Jane : Je sais.
Cassandra : Comme j'ai honte, mon Dieu !
Jane : Tout ce que j'ai... tout ce que j'ai accompli dans la vie, c'est à toi que je le dois, jusqu'à cette vie qu'on a mené ici. Jusqu'à cet amour qu'on a l'une pour l'autre. Et cette vie qui fut la mienne, c'était celle pour laquelle j'étais faite. Celle que Dieu avait prévue pour moi. Jamais je n'aurais pensé que je pourrais connaître un tel bonheur. Jamais je n'aurais pensé que je le méritais. Oh mon Dieu ce que j'ai soif.
Fanny : Ne sois pas triste, pas ce soir.
Cassandra : Au moins je suis heureuse pour toi, Fanny.
Fanny : Mon mari dit que je suis la seule personne au monde en présence de qui il sent qu'il a trouvé le bonheur !
Cassandra : C'est bien qu'il soit conscient de la chance qu'il a.
Fanny : Qu'est-ce que tu fais ?
Cassandra : Ne t'inquiète pas. Je n'ai pas jeté celles où elle parle de toi.
Fanny : Arrête ! Tu ne dois pas brûler les lettres de Jane !
Cassandra : Tu t'imagines toujours qu'il y a un amour secret à découvrir ?
Fanny : Peut-être que je l'espère en tout cas.
Cassandra : Jane était le soleil de ma vie. Elle éclairait chacun de mes jours et soulageait mes chagrins. Aucune de mes pensées ne lui était étrangère. Aujourd'hui je suis amputée d'une part de moi-même.
Fanny : Mon mari te demande de lui accorder une danse.
Cassandra : C'était Jane la meilleure danseuse de cette famille.
Lettre de Jane à Fanny : Quand je contemple une nuit comme celle-ci, j'ai l'impression qu'il pourrait exister un monde sans douleur ni cruauté. Fanny, tu es la joie de mon existence. Ecoute maintenant ton propre cœur.
09:56 Publié dans Films historiques, littéraires, N&B, biopics, Les mots des films, Thèse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jane, austen, raisons, sentiments, orgueils, préjugés, mansfields, park, emma, plumtre, fanny, cassandra