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mercredi, 10 décembre 2014

Chopin pas seul

 

Au musée du Louvre, Paris

 

 

      
Frédéric Chopin, Eugène Delacroix                             Autoportrait, Eugène Delacroix

 A gauche :

Ce tableau, un fragment de la toile George Sand et Chopin, fut sans doute peint en 1838,
année qui consacra la liaison de l'écrivain et du musicien, ami de l'artiste.
Restée inachevée, l’œuvre fut découpée entre 1863 et 1874.
Le portrait de George Sand est conservé à Copenhague.

A droite :

"Une physionomie farouche, étrange, exotique, presque inquiétante".
La description de Delacroix par Théophile Gautier est bien en accord avec ce
"portrait au gilet vert", le plus fameux des autoportraits de l'artiste.

 

george sand, chopin, delacroix
Reconstruction hypothétique
http://en.wikipedia.org/wiki/Portrait_of_Fr%C3%A9d%C3%A9r...

 

 

delacroix, chopin, george sand
George Sand, Eugène Delacroix
Musée Ordrupgaard, Copenhague, Danemark

 

> A consulter également :

http://fichtre.hautetfort.com/archive/2014/12/04/ou-trainer-ses-guetres-pour-faire-plaisir-a-ses-yeux.html

http://fichtre.hautetfort.com/archive/2014/12/14/ou-trainer-ses-guetres-pour-faire-plaisir-a-ses-yeux.html

 

http://fichtre.hautetfort.com/archive/2012/08/20/ou-trainer-ses-guetres-pour-faire-plaisir-a-ses-yeux.html

http://fichtre.hautetfort.com/archive/2012/08/28/ou-trainer-ses-guetres-pour-faire-plaisir-a-ses-yeux.html

http://fichtre.hautetfort.com/archive/2012/08/29/ou-trainer-ses-guetres-pour-faire-plaisir-a-ses-yeux.html

 

> Et plus généralement :

http://fichtre.hautetfort.com/ou-trainer-ses-guetres.html

 

lundi, 07 janvier 2013

L'Enfer de Dante - Chants 21, 23, 24, 30, 33 - Delacroix


dante, delacroix, divine comédie, enfer, enfers, la barque de danteLa barque de Dante (Dante et Virgile aux Enfers), Eugène Delacroix, 1822

 

Extrait de La divine comédie, L'Enfer, 1314, Dante, traduction de Jacqueline Risset, GF-Flammarion 1985 : 

 

Chant 21

[...]
Je me tournai alors comme un homme anxieux
de voir le danger qu'il doit fuir
et que la peur soudaine désarçonne,
mais qui, pour voir, ne prend pas de retard :
et je vis derrière nous un diable noir
qui venait en courant sur le rocher.
[...]

 

Chant 23

[...] "Si j'étais de verre étamé
je ne refléterais pas ton image extérieure
plus vite que je n'accueille celle de ton âme.
Car tes pensées venaient parmi les miennes,
si pareilles de geste et de visage,
que j'ai fait de toutes un seul dessein.
Si la berge à main droite est assez douce
pour que nous puissions passer dans l'autre bolge,
nous éviterons la chasse imaginée."
Il n'avait pas fini d'expliquer ce projet
que je les vis venir, les ailes déployées,
non loin de nous, pour nous saisir.
Mon guide me prit aussitôt dans ses bras,
comme une mère éveillée par le bruit
qui, voyant tout près les flammes allumées,
prend son enfant et fuit sans s'arrêter,
ayant plus soin de lui que d'elle,
à peine vêtue d'une seule chemise ;
sur le dos, du haut de la dure falaise,
il se laissa glisser sur le rocher en pente
qui ferme un des côtés de l'autre bolge.
Jamais l'eau ne coula si vite par un canal
pour faire tourner sur terre une roue de moulin,
quand elle approche le plus près de ses aubes,
que ne fit mon maître sur ce rebord
en me portant sur sa poitrine,
comme son enfant, non comme un compagnon.
[...]
Et le moine : "J'ai entendu jadis dire à Bologne
que le diable a beaucoup de vices, et entre autres,
qu'il est menteur et père de mensonge."
Mon guide à ces mots s'en alla à grands pas,
un peu troublé par la colère, en son visage ;
et je quittai alors ces accablés,
suivant la trace de ses pieds bien-aimés.

 

Chant 24

[...]
Ainsi mon maître me fit m'épouvanter
quand je vis son front se troubler de la sorte,
mais bientôt il mit un baume sur le mal :
car quand nous arrivâmes au pont brisé,
il se tourna vers moi, mon guide, avec cet air
très doux que je lui vis d'abord au pied du mont.
Il ouvrit les bras, après avoir tenu
conseil avec lui-même, et bien considéré
l'éboulement - et puis il me saisit.
Comme celui qui pense et agit à la fois,
et qui semble toujours tout penser à l'avance,
ainsi, me portant vers la cime
d'un gros rocher, il avisa un autre bloc
et dit : "Accroche-toi bien à celui-ci ;
mais éprouve d'abord s'il peut te soutenir."
[...]
L'haleine des poumons s'était faite si courte,
lorsque j'y fus, que je ne pus aller plus loin,
et je m'assis à la première halte.
"Il faut maintenant que tu chasses la paresse",
dit mon maître : "ce n'est pas assis sous la plume
ni sous la couette, qu'on arrive à la gloire ;
or qui consume sa vie sans elle
laisse de soi, sur terre, trace pareille à celle
de la fumée dans l'air, et de l'écume dans l'eau.
Lève-toi donc ; vaincs cette angoisse
par le courage qui gagne les batailles,
s'il ne fléchit pas sous le poids du corps.
Il nous faudra monter plus longue échelle ;
avoir laissé les diables ne suffit pas.
Si tu m'entends, que la leçon te serve."
Je me levai alors, en me montrant pourvu
de plus de souffle que je n'en sentais,
et dis : "Va donc, je suis fort et hardi."
[...] 

 

Chant 30

[...]
J'étais tout entier tendu à les entendre,
quand mon maître me dit : "Prends garde !
encore un peu et je m'emporte contre toi !"
Lorsque je l'entendis parler avec colère,
je me tournai vers lui avec une telle honte
qu'elle s'agite encore dans ma mémoire.
Et tel est celui qui rêve son dommage
et qui en rêvant espère qu'il rêve,
désirant ce qui est, comme si ce n'était pas ;
tel je devins alors, sans plus pouvoir parler,
car je désirais m'excuser, et m'excusais
de fait, tout en croyant ne pas le faire.
"Moins de regret peut laver faute plus grosse",
me dit mon maître, "que n'a été la tienne ;
aussi décharge-toi de tout chagrin,
et rappelle-toi que je suis près de toi,
s'il advient encore que fortune t'amène
là où sont des gens en pareille querelle ;
car vouloir les entendre est bas désir."

 

Chant 33

[...] 
"Mais étends la main à présent jusqu'ici,
ouvre-moi les yeux." Et moi, je ne les ouvris pas,
et ce fut courtoisie de lui être vilain.
[...]

 

Chant 34

[...] 
Comme je devins alors glacé, sans force,
ne le demande pas, lecteur, et je ne l'écris pas,
car toute parole serait trop peu.
Je ne mourus pas, et ne restai pas vivant :
juge par toi-même, si tu as fleur d'intelligence,
ce que je devins, sans mort et sans vie.
[...]
Et si alors je fus troublé,
les gens grossiers le penseront, qui ne voient pas
quel est le point que j'avais dépassé.
[...] 

 

 

41ZAB9F45HL__SL500_AA300_.jpgSe procurer l'ouvrage :

La divine comédie, L'Enfer

34 chants, écrits en 1314

Dante

1985

Traduction de Jacqueline Risset, GF Flammarion

380 pages, édition bilingue

http://www.amazon.fr/Divine-Com%C3%A9die-LEnfer-Dante-Alighieri/dp/2080707256/ref=sr_1_16?s=books&ie=UTF8&qid=1353399190&sr=1-16

 

samedi, 05 janvier 2013

L'Enfer de Dante - Chants 7 & 11 - Considérations sur l'Art et l'argent - Delacroix

Delacroix - les Limbes.JPG
Les Limbes, Delacroix

Sont représentés Cincinnatus, Orphée, Sapho, Caton d'Utique, Marc Aurèle, Virgile, Dante, Homère, Horace, Jules César, Trajan, Hannibal, Pyrrhus, Alexandre le Grand, Les Muses, Achille, Aristote, Aspasie, Alcibiade, Démosthène, Ovide, Platon, Socrate, Dante
Source à consulter : http://www.insecula.com/oeuvre/photo_ME0000051356.html

  

CONSIDERATIONS SUR L'ART ET L'ARGENT

 

Extrait de La divine comédie, L'Enfer, 1314, Dante, traduction de Jacqueline Risset, GF-Flammarion 1985 :

 

Chant 11

[...]
"O Soleil qui guéris la vue troublée,
tu me rends si content quand tu résous mes doutes,
que le doute m'est doux autant que le savoir.
Mais reviens encore un peu en arrière",
lui dis-je, "là où tu me dis que l'usure
offense la divine bonté, et délie-moi ce nœud."
"La philosophie", dit-il, "à qui l'entend
enseigne, et dans plus d'un écrit,
comment la nature procède
de la divine intelligence et de son art ;
et si tu lis bien ta Physique*,
tu trouveras, dans les premières pages,
que l'art humain, autant qu'il peut, suit la Nature,
comme un élève suit son maître,
si bien que l'art est comme un petit-fils de Dieu.
Des deux, Art et Nature, si tu as en mémoire
les premiers vers de la Genèse, il faut
que l'homme tire vie, et qu'il avance ;
et puisque l'usurier suit d'autres voies,
il méprise Nature pour elle et pour son art,
puisqu'il met son espoir en un autre lieu.
[...]

* Ta Physique : la physique d'Aristote.

 

Chant 7

[...]
Là je vis des gens, plus nombreux qu'ailleurs,
de çà, de là, avec des hurlements,
pousser des fardeaux à coups de poitrine.
Ils se cognaient l'un contre l'autre ; et à ce point
chacun se retournait, repartant vers l'arrière,
criant : "Pourquoi tiens-tu ?", "pourquoi lâches-tu ?".
C'est ainsi qu'ils tournaient par le cercle lugubre
sur chaque bord, vers le point opposé,
en criant encore leur honteux couplet ;
puis chacun se tournait, quand il était venu
par son demi-cercle à la deuxième joute.
Et moi qui en avais le cœur comme brisé,
je dis : "Mon maître, explique-moi
qui sont ces gens, s'ils furent tous clercs,
ces tonsurés à notre gauche."
Et lui, à moi : "Tous ils furent borgnes
dans leur esprit durant la vie, de sorte
qu'ils n'eurent aucune mesure en leur dépense.
Leur voix l'aboie très clairement,
quand ils parviennent à ces deux points du cercle
où le péché contraire les désassemble.
Ceux-ci furent clercs, qui n'ont pas de couvercle
de poil en tête, et papes et cardinaux,
en qui l'avarice montre sa démesure."
Et moi : "Maître, chez ces gens-là
je devrais bien en reconnaître quelques-uns
qui furent salis par ces deux vices."
Et lui à moi : "Tu as des pensées vaines :
la vie méconnaissante que firent ces méchants
les brunit à présent à la reconnaissance.
Pour toujours ils iront aux deux points de rencontre :
ceux-ci resurgiront de leur sépulcre
avec le poing fermé, ceux-là le poil rogné*.
Mal donner, mal tenir leur a ôté
le beau séjour, et mis en cette échauffourée :
Ce qu'elle est n'a pas besoin de beaux discours.
Tu peux, mon fils, voir à présent le souffle court
des biens qui sont confiés à la fortune,
pour qui les humains se combattent ;
car tout l'or qui est sous la lune
et a été, ne pourrait donner le repos
à une seule de ces âmes lassées."
"Maître", lui dis-je, "enseigne-moi encore :
cette fortune** que tu nommes, qui est-elle,
qui a tous les biens de la terre en ses griffes ?"
Et lui à moi : "Ô stupides créatures,
quelle ignorance vous opprime !
Je veux que tu saisisses ma pensée.
Celui dont le savoir surpasse tout
fit les cieux*** et leur donna des guides,
si bien que chaque partie lui sur les autres
en répandant une lumière égale.
Pareillement pour les splendeurs mondaines
il mit pour guide une intelligence ordinatrice
qui change à temps tous les vains biens
de race à race, de l'un à l'autre sang,
outre l'opposition des volontés humaines.
Ainsi un peuple règne et un autre languit,
suivant la décision de cette intelligence
qui reste cachée comme serpent dans l'herbe.
Votre savoir ne peut lui résister :
elle pourvoit, juge et maintient son règne
ainsi que font les autres dieux****.
Ses mutations n'ont pas de trêve :
et la nécessité la rend rapide ;
ainsi voit-on les hommes changer souvent d'état.
C'est elle qui si souvent est mise en croix
par ceux-là mêmes qui devraient la chanter,
et qui lui font à tort mauvais renom ;
mais elle est bienheureuse et n'entend rien :
et joyeuse parmi les créatures premières,
elle tourne sa sphère et jouit de soi.
[...] 

* avec le poing fermé : symbole d'avarice.
  
le poil rogné :  symbole de prodigalité.

** cette fortune : la Fortune est ici représentée comme un Ange, chargé de régler le cours des affaires humaines. [...]

*** fit les cieux : Dieu crée les neuf cieux et leur assigne les intelligences motrices ; chacune d'elle reflète sa lumière intellectuelle sur chaque ciel matériel, sur chaque sphère céleste, en distribuant également la lumière divine dont elle est douée.

**** les autres dieux :  les autres intelligences, vulgairement appelées Anges.

 

 

41ZAB9F45HL__SL500_AA300_.jpgSe procurer l'ouvrage :

La divine comédie, L'Enfer

34 chants, écrits en 1314

Dante

1985

Traduction de Jacqueline Risset, GF Flammarion

380 pages, édition bilingue

http://www.amazon.fr/Divine-Com%C3%A9die-LEnfer-Dante-Alighieri/dp/2080707256/ref=sr_1_16?s=books&ie=UTF8&qid=1353399190&sr=1-16