vendredi, 20 juin 2014
L'Algérie IV
Extraits de L'Algérie ou la mort des autres, Virginie Buisson, 2000, Folio :
[...]
Ils sont arrivés.
Ils ont planté des tentes immenses sur la place de l'église, occupé les granges, installé des miradors et fermé le village.
C'est le premier régiment de tirailleurs algériens.
J'ai goûté mes premières boîtes de rations et j'ai appris à armer un fusil.
Un sergent et quatre soldats ont emménagé sur la terrasse au-dessus de ma chambre.
[...]
Le village s'est offert.
Les maisons se sont ouvertes.
Maman nous emmenait mes frères et moi.
Je pouvais évoluer dans les cours, j'ai appris l'Algérie :
les mains tatouées des femmes,
leurs bijoux,
leur fortune, nouée dans un mouchoir, enfouie entre leurs seins, sous leurs gandouras superposées ;
la chôrba brûlante,
le café au poivre de l'hiver, le café pilé au lever du jour, le café de l'accueil, de l'obligeance ;
la semoule roulée de leurs mains rougies de henné, les jours de fête ;
leurs yeux bordés de khôl,
leurs rires, leurs curiosités.
Il arrivait qu'elles me dévoilent leurs richesses serrées dans leur coffre de mariage :
pièce d'étoffe,
photos d'un aïeul médaillé,
mort pour une guerre française,
montre en or dans son emballage,
dentelle de papier journal,
gandouras de velours,
livre d'école.
Les jours de fête, elles faisaient apporter à la maison des pâtisseries au miel et à la fleur d'oranger.
[...]
J'ai vu la ferme des Gilles. C'était au moment où de Gaulle faisait sa tournée des états-majors.
La ferme avait été choisie comme P.C. d'une opération.
J'étais partie le matin avec ma mère, Jean-Pierre et Patrick.
Nous avons installé l'infirmerie dans la grange.
De Gaulle est arrivé en hélicoptère.
Maman était invitée au repas sous la tente avec le général De Maison Rouge.
J'ai préféré rester avec les soldats.
Nous avons partagé des rations ; ils m'ont donné leurs pâtes de fruit, je leur ai laissé l'eau-de-vie.
Puis nous sommes allés ramasser des raisins dans nos casques.
A l'heure de la sieste, nous avons rejoint le lit de l'oued... il restait un peu d'eau, nous avons dérangé les lézards.
C'est là que j'ai rencontré Daniel.
Il était de garde.
Je lui ai offert des raisins.
J'ai attendu avec lui l'heure de la relève.
Il a lâché son fusil pour un harmonica.
Il m'a emmenée sous les lauriers roses.
J'avais un chemisier en nylon transparent et mon premier soutien-gorge.
Mon père était en opération, j'avais évité la blouse réglementaire.
Daniel me regardait.
Je compris ce qu'était le désir.
Il m'a demandé mon âge.
Je lui ai menti en lui répondant 17 ans.
J'en avais à peine 14.
Il m'a embrassée gentiment.
Pacification.
Nous partions en escorte réduite. Maman montait dans la jeep avec mes frères. Moi, j'allais dans le half-track, je m'agenouillais sur les caisses de munitions.
Je m'offrais au vent, à la poussière et aux bruits.
J'aimais mes lèvres gonflées de chaleur et ma gorge desséchée, cette raideur de mes cheveux collés par la sueur que je libérais à la noria.
[...]
J'avais les cheveux très longs, ils faisaient illusion, ils me donnaient l'air d'une jeune fille.
Un aviateur m'a photographiée, il a donné la photo à mon père.
J'ai été accueillie d'une volée de coups.
Une semaine plus tard, ma mère a loué un taxi et nous sommes partis en escorte à Bouïra à 35 kilomètres.
La coiffeuse me coupa les cheveux, m'entortilla ce qui restait dans des bigoudis minuscules.
En sortant, je ressemblais à la femme du maire en plus jeune mais en plus triste.
[...]
J'aimais les traces dorées que laisse l'encre violette sur mon encrier, j'y trempais mes doigts à cause de l'odeur.
[...]
J'ai passé l'hiver à dessiner des cartes de géographie.
J'ai retrouvé l'ennui.
Je me suis barricadée de rêves.
J'aimais bien cette torpeur qui m'envahissait, cette impression d'absence qui me protégeait.
Ma liaison la plus sûre était celle que j'entretenais avec la mer.
Je l'aimais grise les jours de pluie.
verte boueuse, presque brune les jours de vent.
Elle démolissait patiemment les digues, nous préparait une plage différente pour l'été.
Elle était mon souffle, ma liberté.
La nuit, je l'entendais frapper les rochers.
Elle apaisait mes colères.
J'avais une histoire d'amour avec la mer.
La guerre est revenue.
[...]
J'ai peur de la mort des autres. J'ai peur pour Jacques, pour mon père qui ne parle plus, pour mes frères qui ne jouent pas. Mes frères si sages avec leur blouse grise trop raide, leurs cheveux si courts, et ma mère, qui va un fils à chaque bras, qui ne veut pas avoir peur.
Ma mère qui soignait les fellaghas dans les permanences de l'A.M.G. et les militaires de retour d'opérations. Ma mère sûre de notre innocence.
Jacques a raison, il n'y a plus d'avenir.
Pourtant, il y a des moments où j'aimerais être contre lui immobile, tranquille et sans mémoire.
Alger ne se ressemble plus. [...]
La ville n'est plus qu'un lieu pourrissant, boursouflé de camions qui déménagent des vies en lambeaux.
[...]
L'Algérie ou la mort des autres
Virginie Buisson
2000
Folio
96 pages
http://www.amazon.fr/LAlg%C3%A9rie-mort-autres-Virginie-B...
08:00 Publié dans Ecrits, littérature contemporaine | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 19 juin 2014
She waits XXVI - Summertime
http://www.youtube.com/watch?v=u2bigf337aU
http://www.youtube.com/watch?v=xJOtaWyEzaI
Summertime and the livin' is easy
Fish are jumpin' and the cotton is high
Your daddy's rich and your ma' is good-lookin'
So hush, little baby, don't you cry
One of these mornings you're gonna rise up singing
Then you'll spread your wings and you'll take to the sky
But 'till that morning, there ain't nothin' can harm you
With daddy and mummy standin' by
http://www.youtube.com/watch?annotation_id=annotation_392...
http://www.youtube.com/watch?v=hRCRMJwrTY8
http://www.youtube.com/watch?v=UYlIHI35oak
http://www.youtube.com/watch?v=alrBe2XF0IA
07:00 Publié dans Chanson | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 18 juin 2014
Nicolas bedos
Une "pitrerie" en forme de bouquet estival.
Tout le monde - ou presque - en prend pour son grade
y compris l'auteur
http://m.youtube.com/watch?v=FjljlmQHbz8
https://www.youtube.com/user/onpcofficielle
07:00 Publié dans Farce et attrape, Politique & co, Trivialités parisiennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nicolas bedos, bedos, laurent ruquier, aymeric caron, natacha polony, caron, on n'est pas couchés
mardi, 17 juin 2014
She waits XXV - Un été
http://www.youtube.com/watch?v=mEzH0FuL8qo
Michel Legrand chante, accompagné à la harpe et orchestre
http://www.youtube.com/watch?v=-mxMPVMxJmg
http://www.youtube.com/watch?v=kWMxX5MGuHI
> Et le film : http://fichtre.hautetfort.com/archive/2012/06/04/un-ete-1...
Michel Legrand (né en 1932)
A consulter également (cf peau d'âne) :
http://www.lefigaro.fr/musique/2009/02/12/03006-20090212A...
07:00 Publié dans Chanson, Les mots des films | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michel legrand, un été 42, un été 1942, summer 42, summer 1942, peau d'ane
lundi, 16 juin 2014
She waits XXIV - Tous les moulins de mon coeur
http://www.youtube.com/watch?v=wna9UCYDbaE
http://www.youtube.com/watch?v=VsBRcQdm07I
Comme une pierre que l´on jette
Dans l´eau vive d´un ruisseau
Et qui laisse derrière elle
Des milliers de ronds dans l´eau
Comme un manège de lune
Avec ses chevaux d´étoiles
Comme un anneau de Saturne
Un ballon de carnaval
Comme le chemin de ronde
Que font sans cesse les heures
Le voyage autour du monde
D´un tournesol dans sa fleur
Tu fais tourner de ton nom
Tous les moulins de mon cœur
Comme un écheveau de laine
Entre les mains d´un enfant
Ou les mots d´une rengaine
Pris dans les harpes du vent
Comme un tourbillon de neige
Comme un vol de goélands
Sur des forêts de Norvège
Sur des moutons d´océan
Comme le chemin de ronde
Que font sans cesse les heures
Le voyage autour du monde
D´un tournesol dans sa fleur
Tu fais tourner de ton nom
Tous les moulins de mon cœur
Ce jour-là près de la source
Dieu sait ce que tu m´as dit
Mais l´été finit sa course
L´oiseau tomba de son nid
Et voila que sur le sable
Nos pas s´effacent déjà
Et je suis seul à la table
Qui résonne sous mes doigts
Comme un tambourin qui pleure
Sous les gouttes de la pluie
Comme les chansons qui meurent
Aussitôt qu´on les oublie
Et les feuilles de l´automne
Rencontrent des ciels moins bleus
Et ton absence leur donne
La couleur de tes cheveux
Une pierre que l´on jette
Dans l´eau vive d´un ruisseau
Et qui laisse derrière elle
Des milliers de ronds dans l´eau
Au vent des quatre saisons
Tu fais tourner de ton nom
Tous les moulins de mon cœur
http://www.youtube.com/watch?v=wdovT7t3nZY
http://www.youtube.com/watch?v=WJ5QEXzPpE0
http://www.youtube.com/watch?v=H4kS9dDFwU8
Ajout du 24 janvier 2015
Paroles de Mansour Rahbani
لا بداية ولا نهاية والوقت مارق غريب
متل مرورى بافكارك لحظة بتلمع وبتغيب
الدنيى حلقة عم بتدور والقمر بالسما يدور
انت حولى وانا حولك فى شى جاذبنا ومندور
مطرح صبيعك ع كتفى عم يحرقنى من ايام...
يمكن لوبتبسلى المطرح تهدا اوجاعى وبنام
صيف السنة انتهى بسرعة واحمرت احراش الغار
والمرا اللى شعرا احمر متلن شعلانة بالنار
لا بداية ولا نهاية والوقت مارق غريب
وانا بتذكرنى وبتغيب بمرق ببالك وبروح
ومين بدو يداوى الجروح
07:00 Publié dans Chanson | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 15 juin 2014
En marchant vers Toi
Le dernier repas de Jésus, William Blake
En marchant vers Toi, Seigneur
Notre cœur est plein de joie
Ta lumière nous conduit
Vers le Père dans l'Esprit
Au royaume de la vie.
Par ce pain que nous mangeons
Pain des pauvres, pain des forts
Tu restaures notre corps
Tu apaises notre faim
Jusqu'au jour de Ton retour
En marchant vers Toi, Seigneur
Notre cœur est plein de joie
Ta lumière nous conduit
Vers le Père dans l'Esprit
Au royaume de la vie.
Par ce pain que nous mangeons
Pain des anges, pain du Ciel
Tu nourris nos corps mortels
Tu nous ouvres le banquet
Qui n'aura jamais de fin
En marchant vers Toi, Seigneur
Notre cœur est plein de joie
Ta lumière nous conduit
Vers le Père dans l'Esprit
Au royaume de la vie.
Par ce vin que nous buvons
Joie de l'homme, joie de Dieu
Ton alliance est révélée
Au royaume des vivants
Nous boirons le vin nouvea
En marchant vers Toi, Seigneur
Notre cœur est plein de joie
Ta lumière nous conduit
Vers le Père dans l'Esprit
Au royaume de la vie.
Par ce vin que nous busons
Source vive de l'amour
Nous restons en communion
Avec Dieu vivant et vrai
Père, Fils et Saint-Esprit
En marchant vers Toi, Seigneur
Notre cœur est plein de joie
Ta lumière nous conduit
Vers le Père dans l'Esprit
Au royaume de la vie.
07:00 Publié dans Beaux-Arts, Foi, Peinture | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 14 juin 2014
Etymologie - Chercher des noises
Source : Direct Matin, lundi 4 février 2013
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> Pour davantage : http://fichtre.hautetfort.com/les-mots-francais.html
07:00 Publié dans Les mots français | Lien permanent | Commentaires (0)