mardi, 04 mars 2014
Normal
"L’idée d’un homme normal est un mythe semblable au mythe nazi."
Maurice Merleau-Ponty (1908-1961)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Merleau-Ponty
07:00 Publié dans Les mots français, Réflexions, philosophie | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 03 mars 2014
Comment Max a phantasmé l'apocalypse
Crédits photographiques Victoria Elmgren
Extrait de Comment j'ai mis un coup de boule à JoeyStarr, Max Monnehay, 2013, Christophe Lucquin Editeur :
[...]
"Qu'est-ce que t'as prévu de porter, alors, pour la fin du monde ?"
Au bout du fil on glousse et puis on tousse et enfin on se racle la gorge.
"Maman, je croyais que t'avais arrêté de fumer.
- On va tous mourir demain, dis-moi à quoi ça pourrait bien servir.
- On ne va pas mourir, maman.
- Alors, explique-moi pourquoi tu vas t'enterrer avec tous ces débiles, si t'en es si sûre que ça."
Je n'en ai pas la plus foutue petite idée. Je ferme les yeux et ouvre la bouche comme pour crier, et je n'ai pas non plus d'explication à ça. La plupart du temps, je n'ai pas la moindre raison valable de faire ce que je fais. C'est simplement que si je devais attendre d'en avoir une, de raison valable, le champ de mes actions se réduirait au strict minimum. Peut-être même à moins que ça. Paralysie permanente, on appelle ça.
"Au revoir Maman. Je t'appelle demain.
- Attends, ton père est en train de clouer des planches aux fenêtres de la maison, écoute. Tu entends ? Dis-moi s'il te plaît que tu entends ça. C'est formidable. Pauvre dingue.
- Salut m'man.
- Adieu ma fille."
Et elle glousse et tousse et se racle la gorge.
¤ ¤ ¤
La Sybille de Cumes a vécu près de Naples au VIe siècle avant Jésus-Christ. Les hautes figures de la société romaine la consultaient sur divers sujets, du plus anodin au plus grave.
En disant cela, Mamie Madeleine plonge un sixième carré de sucre blanc dans sa tasse de thé vide.
Elle dit que la Sybille entrait en transe dans sa caverne. De ses fricotages avec Apollon, elle tirait des présages, qu'elle écrivait sur des feuilles de chêne, lesquelles étaient soigneusement conservées.
Mamie Madeleine porte la tasse à sa bouche. Une minute passe, durant laquelle de la poudre de sucre est projetée tout autour de nous, sur la petite table roulante couleur bleu hôpital, sur la moquette râpée, sur mes genoux.
La Sybille de Cumes a prédit que le monde durerait neuf cycles de huit cents ans chacun. Sans que personne ne lui ait rien demandé, parce que personne n'en avait clairement rien à carrer de ce qui pourrait advenir après sa propre mort et, éventuellement, celle de ses enfants et petits-enfants, elle a balancé comme ça que la génération qui commencerait aux alentours de l'an deux mille après Jésus-Christ serait la dernière. [...]
Mamie Madeleine fourre un doigt au fond de sa gorge et régurgite dans son mug estampillé Meilleure Mamie du Monde le sucre à moitié dissout par les sucs gastriques. [...]
La télécommande à la main, Mamie Madeleine dit que Nikki s'est mariée neuf fois, dont quatre fois avec Victor. [...] Selon les calculs de la meilleure mamie du monde, la fin du monde coïncidera avec la désintégration d'une petite ville américaine. Cette petite ville qui porte le nom de Genoa City.
¤ ¤ ¤
Quoi maman ?
- Je voulais te dire que je t'avais pris rendez-vous avec le docteur Clémentin vendredi en huit.
- C'est qui ça encore. Un psy ? Je t'ai déjà dit que je n'en avais pas besoin.
- Nan, un gynéco. Va savoir ce que vous allez fabriquer, tous, enterrés pendant des heures à attendre la mort.
- Maman !
- Avec ton père, on ne s'est pas touché depuis 2008 et là il m'attend en mini-slip dans la chambre. Il a ressorti notre parure de lit fuchsia et fait brûler toute ta vieille réserve d'encens. On se croirait dans le vagin de Béatrice Dalle. Alors, laisse-moi craindre le pire.
- T'en fais pas pour moi. J'ai toujours un spray au poivre dans mon sac.
- Ahah, si tu crois que c'est ça qui va sauver tes miches ma fille !
- Comment va Mamie ?
- Elle a voulu rester là-bas. Ca ne l'a pas convaincue, mais je lui ai dit : si tu ne viens pas, des chats te mangeront le visage.
- Maman, tu pourrais pas essayer d'être moins sordide ?
- Si tu ne viens pas, des chatons te mangeront le visage ?
- Au revoir Maman.
- Adieu ma fille.
- Arrête de me dire adieu, s'il te plaît.
- J'arrêterai de te dire adieu quand ton père... aura ôté ces menottes en fourrure rose, mais... Chéri d'où sors-tu ces choses ?
- Oh non. C'est à moi.
- Hé bien. De mieux en mieux."
Elle glousse et tousse et se racle la gorge.
C'est peut-être simplement ça, la fin du monde. Tes vieilles menottes en fourrure rose autour des poignets de ton père.
[...]
A propos de l'auteur : http://www.babelio.com/auteur/Max-Monnehay/6024
Comment j'ai mis un coup de boule à Joey Starr
Max Monnehay
2013
Christophe Lucquin Editeur
64 pages
http://www.amazon.fr/Comment-jai-coup-boule-Joeystarr/dp/...
07:00 Publié dans Ecrits, littérature contemporaine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : comment j'ai mis un coup de boule, joeystarr, max monnehay, christophe lucquin
dimanche, 02 mars 2014
La mémoire de nos corps
Question de foi "A la résurrection, porterons-nous la mémoire de nos corps ?", in La revue Passy Notre-Dame, numéro 522, décembre 2013, Père Luc de Bellescize :
Dans le film du cinéaste danois Dreyer, Ordet, qui signifie "la parole", tournée en 1955, un jeune époux perd son épouse en couches et toute la maison entre dans le grand silence du deuil. Un des enfants arrête la pendule du salon. Le vieux père de famille répète comme un douloureux refrain la parole de Job : "Le Seigneur a donné, le Seigneur a ôté, que le Nom du Seigneur soi béni" (Job 1,21), puis il dit à son fils que l'âme de son épouse est vivante avec Dieu. Mais le fils répond ces mots si justes : "Mais son corps ? Jamais son corps." Comme elle est vraie cette parole.
Ce que nous aimons chez les êtres, c'est leur présence charnelle, leur manière d'apparaître, c'est le souffle fragile de leur vie, le vase d'argile de leur corps, de leur odeur, de leurs gestes, de leurs vêtements qui font le charme indéfinissable d'une personne où les "parfums, les couleurs et les sons se répondent", comme l'écrit Baudelaire.
"A la résurrection, on ne prend plus ni femme ni mari" (Mt 22,30), dit le Seigneur, mais cela ne signifie pas que l'on n'a jamais été marié. Il est juste de dire que dans la résurrection nous retrouverons ceux que nous avons aimés, ceux qui nous ont donné la vie, car notre foi repose non pas sur l'imagination inquiète des hommes, mais sur le corps véritable du Christ ressuscité qui dit à Thomas : "Avance ton doigt, et vois la marque des clous, avance ta main et mets-la dans mon côté, et ne sois plus incrédule, sois croyant" (Jn 20,31).
Le corps du Christ résiste aux mains de l'apôtre et son doute se dissout dans la solidité du réel.
Nous sommes les héritiers de sa résurrection. Le Christ n'est plus soumis à la puissance de la mort, et en ce sens il est autre, mais en même temps il est bien le même, et il porte en son corps la mémoire de sa vie, la marque de son amour, les signes de sa victoire.
Nos corps ressuscités porteront pour toujours la mémoire de la charité, car tout passe et tout casse, mais la charité ne passera jamais.
Les blanchisseuses, Edgar Degas
07:00 Publié dans Beaux-Arts, Foi, Peinture | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 01 mars 2014
Etymologie - Avoir une marotte
Source : Direct Matin, vendredi 18 janvier 2013
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> Pour davantage : http://fichtre.hautetfort.com/les-mots-francais.html
07:00 Publié dans Les mots français | Lien permanent | Commentaires (0)