lundi, 11 juin 2012
Homo comicus
"Ont glissé leur bulletin peu avant midi dans un bureau de vote du XVIe arrondissement. Ils n'ont pas souhaité faire de commentaire"
(source : Metro, lundi 11 juin 2012)
http://www.linternaute.com/television/programme/photo/les...
Extrait de Homo comicus ou l'intégrisme de la rigolade, François l'Yvonnet, 2012, Ed. Mille et une nuits
Les "Guignols de l'Info" sont une grosse machine à fabriquer de la dérision - comme on fait au mètre de la saucisse -, avec leurs nègres (fort nombreux), leurs voix et leurs vedettes. Il n'y a plus d'auteurs mais un staff. L'auteur a disparu et avec lui la force de l'attaque. Car on ne peut atteindre le pouvoir qu'à partir d'une identité revendiquée, fût-elle collective (parti ou syndicat). C'est la condition du défi ou du duel. Or, les "figures" - invitantes et invitées - de ces émissions de divertissement sont interchangeables, comme les portraits dressés sont parfaitement réversibles. L'essentiel pour ce petit monde est d'être à l'antenne, comme on dit. Une expression qui en dit long sur leur mode d'existence.
La parodie passe à la trappe au profit d'une mise en scène complaisante et finalement assez mimétique des travers physiques, des tics de langage et des appartenances. Le néo-humoriste, fût-il masqué, débite devant les caméras (et d'éventuels spectateurs préalablement "chauffés") un laïus insipide que reçoivent béatement devant leur téloche des millions de quidams hilares. Partout les mêmes quidams, partout la même hilarité. Lecteur, tends l'oreille et tu entendras monter des logis le grand esclaffement du soir. Rassasié de rigolade, le peuple pourra rejoinde sa couche.
Rien de plus stérile et de plus anesthésiant que de se tenir les côtes pour se tenir les côtes. L'apothéose de la dérision des politiques est aujourd'hui atteinte avec la prolifération des imitateurs. La question n'est pas de savoir s'ils sont bons ou mauvais (comme chez les souteneurs et les toreros, il doit y avoir de tout), mais de mesurer l'effet produit : de la même manière que le vote ne fait plus qu'"imiter" le sondage, la parole politique cherche désormais à coller à son imitation, devenant un signifiant pur. Pur de toute signification et par là même irréfutable, seulement répétable à l'infini.
Conséquence prévisible de cette gondolade généralisée : la politique est devenue dérisoire. Certes, on ne saurait mettre au seul crédit des néo-humoristes la disqualification du politique. Ce serait leur faire trop d'honneur. Ils ne sont qu'un symptôme, parmi d'autres, de l'irréversible processus de "disneylandisation" de nos sociétés. La scène politique n'a jamais mieux porté son nom.
François l'Yvonnet
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_L%27Yvonnet
http://www.babelio.com/auteur/Francois-LYvonnet/69627
Se procurer l'ouvrage :
Homo comicus ou l'intégrisme de la rigolade
François l'Yvonnet
mars 2012
Ed. Mille et une nuits
80 pages :
http://www.amazon.fr/Homo-comicus-ou-lint%C3%A9grisme-rig...
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