jeudi, 06 décembre 2012
Détails de Guernica
Extrait de Et Picasso peint Guernica, 2007, Alain Serres, Ed. Rue du monde :
Le bras d'un homme était déjà là, à la naissance de la toile. Avec son arme brisée et la fleur qui pousse de son poing serré. Peut-être un combattant de la liberté, impuissant, face aux bombardiers ? Disloqué.
Picasso renverse la tête de la mère et celle de son enfant.
Brise l'image de la Vierge à l'enfant.
Le monde à l'envers comme l'enfant qui meurt avant d'avoir vécu, comme les gouttes de pluie qui, ce jour-là, sont d'acier.
Comme ces yeux, ces narines qui sont des larmes.
La bouche de l'enfant qui se tait et celle de la mère qui pleure, qui hurle.
Qui est ce taureau ? Pourquoi se tait-il ?
Et ses deux yeux d'homme qui nous regardent ? Qu'a-t-il fait de sa force animale ?
Et brusquement, Picasso retourne le corps de la bête, mais ses yeux toujours nous fixent.
Le cheval, suspendu dans sa course, tourne la tête vers le taureau et semble crier dans sa direction.
Quelle arme, quelle corne a ouvert dans ses flancs cette énorme plaie qui crie aussi ? De quels cieux tombe cette lance qui transperce son corps ? Et ces traits soigneusement alignés sur son corps : sont-ils la liste des morts que l'on compte ? Des tombes par centaines ?
Ou bien les lettres, puis les mots qui, côte à côte, font le gris des journaux, porteurs de mauvaises nouvelles ?
Qui est ce cheval ?
"Le peuple espagnol", répondra le peintre.
Picasso peint aussi un oiseau. Vertical.
Il s'égosille. Il veut nous dire quelque chose depuis son ombre. Sûrement quelque chose d'important.
Mais qui sait traduire le cri silencieux des oiseaux.
Se procurer l'ouvrage :
Et Picasso peint Guernica
Alain Serres
2007
Ed. Rue du monde
51 pages
http://www.amazon.fr/Picasso-peint-Guernica-Alain-Serres/...
¤ ¤ ¤
Et rien à voir, mais tout de même très "guerniquéen" : un cheval... du Carrousel de Lancelot, à Eurodisney.
08:00 Publié dans Beaux-Arts, Peinture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : guernica, picasso, alain serres
mercredi, 05 décembre 2012
Et Picasso peint Guernica - Alain Serres
Extrait de Et Picasso peint Guernica, 2007, Alain Serres, Ed. Rue du monde :
Le 26 avril 1937, à 16h30, le ciel de Guernica, petite ville du nord de l'Espagne, s'assombrit. Les cloches de la cité basque se mettent à sonner étrangement. Quinze minutes après, les premiers avions lâchent déjà leurs bombes au-dessus des places, des rues et des habitations. Ce sont des bombardiers allemands de la division Condor, suivis d'avions italiens. 19h45, le dernier avion disparaît. La ville brûle, presque rasée. L'église est debout.
Le 1er mai, Picasso découvre l'horreur à la une de son journal. Le jour même, dans son atelier de la rue des Grands-Augustins, il commence à jeter des idées sur du papier, à dessiner des morceaux de colère, à imaginer une toile à la hauteur de son émotion. Il pensait peindre son atelier d'artiste ; ce soir, c'est décidé, il peindra sa douleur d'artiste espagnol : Guernica. Picasso peint d'emblée Guernica en noir et blanc. Il fera quelques essais en couleurs mais s'en tiendra en définitive à son choix initial. Le premier dessin que Picasso jette sur une feuille, réagissant à la lecture du journal.
Etude pour Guernica (II), 1er mai, Musée National Centre d'Art Reina Sofia.
Au tout début de l'année 1937, Picasso réalise cette gravure qu'il faut lire en miroir, comme un tampon. Dans un style annonçant celui de Guernica, il dit son rejet de la violence et du fascisme.
Songe et Mensonge de Franco, janvier 1937
Picasso fait remonter en lui les dessins contre Franco qu'il a gravés au tout début de l'année, des compositions fortes des peintres Goya ou Le Douanier Rousseau, des taureaux et des chevaux qui lui viennent de sa lointaine Espagne et d'antiques légendes. Depuis quelques années, Picasso dessine de très nombreux minotaures et des chevaux sortis tout à la fois de la mythologie grecque et des arènes espagnoles.
Minotaure et Cheval, 1935
Comment traduire la douleur des chairs et de l'esprit avec du noir et du blanc ? A-t-on le droit d'évoquer un massacre avec un dessin simple comme le dessin d'un très jeune enfant ? Comment faire pour qu'une image soit plus forte que le souffle de 50 tonnes de bombes ? Pour qu'elle vive longtemps après que les poussières et les éclats ne soient retombés ? Longtemps dans les yeux des hommes, même quand ils les ferment.
Etude pour Guernica (III), 1er mai, Musée National Centre d'Art Reina Sofia
Cheval (V), 1er mai, Musée National Centre d'Art Reina Sofia
Etude pour Guernica (IV), 1er mai, Musée National Centre d'Art Reina Sofia
Le 9 mai, après plusieurs dizaines de dessins, l'idée de l'immense fresque prend forme sur la feuille de papier.
Etude pour Guernica (VII), 9 mai, Musée National d'Art Reina Sofia
Le 11 mai, on lui livre enfin plus de sept mètres de toile. A peine est-elle fixée au mur que Picasso monte sur son escabeau et commence à dessiner, à l'aide d'un fusain, des personnages qui le dépassent.
Guernica, état I, 11 mai
Guernica, état V
Guernica, état VI
Guernica, état VII
Guernica, 4 juin 1937, Pablo Picasso
7,82 x 3,51 mètres
Se procurer l'ouvrage :
Et Picasso peint Guernica
Alain Serres
2007
Ed. Rue du monde
51 pages
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