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mardi, 28 octobre 2014

Faust Symphonie - Franz Liszt

 liszt

 

1811 : naissance à Raiding, Autriche-Hongrie (le 22 octobre)
1822 : étudie à Vienne la composition avec Salieri et le piano avec Czerny
1823 : arrivée à Paris, premiers concerts
1835 : Harmonies poétiques et religieuses
1834-1839 : liaison avec Marie d'Agoult
1837 : naissance de Cosima future épouse de Bülow puis de Wagner
1847 : début de la liaison avec la princesse Carolyne de Sayn-Wittgenstein
1848 : Les Préludes (d'après Lamartine)
1848-1858 : Kapellmeister à Weimar
1849 : Années de pèlerinage : l'Italie ; Concerto pour piano n°2
1853 : Sonate en si mineur

1854 : Orphée, Mazeppa
1855 : Années de pèlerinage
: la Suisse
1856 : Concerto pour piano n°1 (commencé en 1849)
1861-1869 : séjour romain
1865 : tonsure et ordres mineurs : Liszt devient "l'abbé Liszt"
1886 : mort à Bayreuth (le 31 juillet)

 

 > A consulter également : http://fichtre.hautetfort.com/archive/2013/11/08/franz-liszt.html

 

http://www.youtube.com/watch?v=le8BdI8C-_E

 

Extrait de "Franz Liszt, Faust-Symphonie", Michel Fleury, in Cadences, l'actualité des concerts et de l'Opéra, n°276 septembre 2014 :

 

Figure romantique de dimension européenne, le Hongrois Franz Liszt (1811-1886) a exercé une profonde influence sur l'évolution de la musique en tant qu'inventeur du poème symphonique et par ses innovations harmoniques, orchestrales et pianistiques.

 

L’œuvre de Goethe a inspiré à Liszt une page géniale et monumentale, d'une forme intermédiaire entre la symphonie et le poème symphonique. Adoptant d'une manière très libre le plan en trois mouvements d'une symphonie, elle se défère à un programme littéraire. Elle prolonge ainsi les symphonies dramatiques de Berlioz.

 

La Symphonie fantastique de Berlioz (1830) a ouvert un nouveau chapitre de l'histoire de la musique : celui de la musique à programme. On entend sous ce terme (ou sous celui de poème symphonique ou même de pièce caractéristique) une œuvre symphonique ou plus généralement instrumentale (avec adjonction possible de voix) qui se propose de transposer dans le domaine sonore un programme. Ce programme coïncide au départ avec un texte littéraire (en l'occurrence, pour la Fantastique, un texte de Berlioz lui-même ; Schumann s'inspire de textes de Hoffmann ou de Jean-Paul dans les Kreisleriana et le Carnaval, Liszt de Lamartine dans Les Préludes...).

Pièce caractéristique ou poème symphonique intègrent dès le départ des éléments descriptifs (décor, atmosphère historique) au donné psychologique. Plus tard, cet aspect descriptif prévaudra et l'on passera insensiblement du romantisme descriptif à l'impressionnisme (Debussy : La Mer).

A la suite de Berlioz, Liszt a développé cette conception de programme dans ses poèmes symphoniques. Sa Faust-Symphonie, qui conserve l'allure générale d'une symphonie, mais avec un plan très libre, s'inscrit dans le sillage de la Fantastique berliozienne.

C'est Berlioz, alors attelé à sa Damnation de Faust, qui révéla à Liszt le Faust de Goethe. Projetant d'abord d'écrire un opéra, le musicien hongrois s'orienta finalement vers la forme d'une composition symphonique, dans l'esprit de la musique à programme dont il était, avec Berlioz, le créateur. Le projet prit la forme de trois vastes "morceaux caractéristiques" évoquant le caractère psychologique de chacun des protagonistes, plus que le cours littéral de l'intrigue ou ses décors.

Par ailleurs, les nombreux thèmes représentant ce contenu psychologique devaient être soumis à des métamorphoses, à des traitements et à des combinaisons (rappels et échanges thématiques d'un morceau à l'autre) traduisant les rapports entre les personnages, et le contenu moral et métaphysique de l’œuvre de Goethe. Les premières ébauches remontent au début des années 1840. L’œuvre fut principalement écrite à Weimar au cours de l'été 1854. La version primitive était purement orchestrale. Par la suite, Liszt ajouta un épilogue avec chœur et ténor solo pour célébrer la rédemption par l'amour et la victoire de l'Eternel féminin. Cette vaste partition (75 minutes) ne répond que de très loin au canevas général d'une symphonie (d'ailleurs dépourvue de scherzo). Sa structure repose sur l'imbrication et les variantes de sept thèmes principaux, exposés par les parties I et II, au sein d'un plan et d'un traitement global riches de significations symboliques. Une exégèse très complète en a été donnée par Serge Gut dans sa monumentale monographie parue en 1989 aux Editions de Fallois. On se borne à en donner les grandes lignes.

I - Faust

Ce mouvement est très développé et son architecture complexe traduit la nature tourmentée du personnage, dont les contradictions et les interrogations métaphysiques sont représentées par cinq thèmes.

Le premier, exposé dans les premières mesures, est un thème atonal (basé sur l'accord de quinte augmentée) d'une extrême audace pour l'époque. C'est le Désir inassouvi de savoir, (1) en relation avec la Douleur (dans le conséquent associé). Il est le leitmotiv central, véritable pilier de l'ensemble de l’œuvre.

Suivent : L'Agitation passionnée de Faust (2), son Désir d'amour (3), son Amour pour Gretchen (4), et enfin la Grandeur et immortalité de Faust (5), phase grandiose et héroïque.

(2) et (4) servent de thèmes à la forme sonate très libre de ce premier mouvement. La brièveté du développement souligne que l'essentiel réside dans le symbolisme des leitmotive. (1) est le motif dominant : l'accord de quinte augmentée, avec son instabilité, est la signature de Faust. Il résume à lui seul son insatisfaction permanente et sa soif éternelle de reconnaissance. Et s'il fallait encore souligner l'importance de cet accord, Liszt place les 3 tonalités principales en rapport de tierce majeure (do, mi et la b majeurs).

II - Gretchen

Ce mouvement lent contraste par sa simplicité et sa grâce naturelle avec les complications torturées de I.

Gretchen est représentée par deux idées : la première symbolise par sa fluidité et sa coupe classique la jeune fille simple, douce et pure ; elle reviendra dans l'épilogue avec le sens supplémentaire de la Rédemption par l'amour (6) (la signification philosophique se confond ici avec le personnage qui l'incarne). La deuxième est le motif de l'Attente de l'amour (7).

(6) et (7) fournissent la matière à la partie A d'un grand lied ABA'. B utilise les thèmes de I "agencés en un véritable duo d'amour symbolisant la rencontre de Marguerite et leur amour réciproque". A' ramène les deux thèmes de Gretchen mais l'irruption de (4) souligne que depuis sa rencontre avec Faust, elle a été profondément marquée et n'est plus la même.

III - Méphistophélès

D'une structure encore plus complexe que I, ce mouvement n'a que peu d'éléments nouveaux. Il reprend quatre des cinq motifs de I, mais en les déformant, à l'instar de Berlioz qui dénature le thème de l'Idée fixe dans le final "satanique" de sa Symphonie fantastique.

Ainsi les composantes du personnage de Faust sont-elles tournées en dérision et réduites au grotesque et au caricatural, et la musique illustre fidèlement la devise de Méphisto : "Je suis l'Esprit qui toujours nie". Liszt nous signifie "que Méphisto n'est autre que le miroir grimaçant de Faust", son double infernal...

Deux éléments nouveaux toutefois : le Diabolus in musica est omniprésent, et sous forme de quarte augmentée ou intégré aux accords de septième diminuée, il prend la valeur d'une signature du diable. Liszt introduit par ailleurs une idée de son concerto MalédictionI, l'Orgeuil, soulignant ainsi le rôle de l'orgueil dans la chute de Satan et dans sa malédiction.

Ce mouvement adopte, comme le premier, une forme sonate libre (exposition, développement, récapitulation, coda, avec deux longues césures à la fin de l'exposition et de la récapitulation). A la fin du développement, (6) s'impose comme l'idée force, et résonne dans son originelle pureté (cor et violoncelle).

La rédemption par l'amour est désormais acquise, et l'esprit du mal vaincu par cette apparition de Gretchen, même si les thèmes de Faust conservent leur caractère satanique au cours de la réexposition. Le chœur mystique et contemplatif apporte une conclusion apaisante.

Le ténor s'empare du motif de la Rédemption par l'amour pour proclamer la victoire de l'Eternel féminin : un demi-siècle plus tard, le même texte de Goethe fournira à Mahler l'apothéose de sa Huitième Symphonie. Gretchen a sauvé l'âme de Faust.

L'accord parfait de do majeur dans la lumière duquel baigne cette conclusion possède lui aussi une forte signification. Après les tensions positives de l'accord de quinte augmentée (désir inassouvi de savoir), et négatives de la septième diminuée (Méphisto et ses tentations), "le drame de la Faust-Symphonie se résorbe dans la majesté triomphante, douce et lumineuse, de l'accord de repos de d'harmonie par excellence, qui, ici, baigne dans une atmosphère de transfiguration." (Serge Gut).

 

07:00 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0)

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